Capitalisme et humanisme

PAR MARTIN DE WAZIERS

Si la Renaissance dure 3 siècles environ, elle se termine vers la fin du XVIe, marquant celle du Moyen Âge. C’est le début des Temps Modernes, la révolution de l’économie avec le commerce de la laine anglaise par les marchands flamands et l’avènement du capitalisme au XVIIe s. ; mais, il faudra attendre la révolution industrielle du XVIIIe s. pour laisser libre cours aux premières théories d’Adam Smith et voir le capitalisme émerger et se développer aux XIXe et XXe !

L’humanisme est une création d’Auguste Comte qui a dit : « L’amour pour principe, l’ordre pour base, et le progrès pour but, tel est le caractère fondamental du régime définitif que le positivisme vient inaugurer. » Toute connaissance humaine passe par trois états théoriques successifs : théologique, métaphysique et positif ; il veut ainsi cerner l’évolution de l’esprit humain individuel et aussi de l’humanité entière, en nous ancrant dans la réalité terrestre.

Ne pas sombrer dans les ‘-ismes’ modernes

Si le savoir et l’épanouissement peuvent venir de la culture, l’humanisme prône l’altruisme, ce penchant bienveillant de l’un pour l’autre. Alors que le capitalisme pousse la production et la consommation, il ne doit pas négliger le partage des richesses et ne pas sombrer dans les ‘-ismes’ du monde moderne. Ce suffixe est, en général, attaché à une doctrine, un dogme, une idéologie ou une théorie… et se veut indiquer le passage de l’idée de fond à l’action !

Capital ou humain, on est dans la matérialité ; église ou croyant, on est dans la spiritualité. Dans les deux cas, on a créé des élites (‘élues’ selon l’étymologie) et des institutions pour gérer leurs développements ; nous savons que le pouvoir est tentation, avec lui le besoin de domination, même si certains grands de ce monde n’en ont jamais abusé (St Louis, le Roi Baudouin, François Michelin) alors que d’autres se sont vautrés dans les excès corrompus.

Technologie, finances, humain sont les 3 piliers de l’entreprise, m’avait souvent rappelé nul autre mentor que François Michelin, en me donnant un petit trépied surmonté d’une boule pour ne jamais oublier ! Je l’ai étudié, recherché en décryptant XIXe et XXe s., analysé et synthétisé dans un essai sur des cycles de 30 ans qui ramènent chacune des 3 dimensions TFH à la queue-leu-leu : Technologie 1945-75, Financière 1975-2005 et Humaine 2005-35 !

Nobel d’économie 2024

N’est-ce pas pour cela que l’on a pris conscience de l’importance de la relation humaine ces derniers vingt ans : relation à soi avec l’accompagnement de dirigeants, relation à l’autre qui n’est pas qu’une ressource (RSE), relation alentour avec reconnaissance du bien commun (ESG). Il était grand temps de rapprocher ‘capitalisme et humanisme’ dans une révolution imparable si l’on ne veut pas qu’elle tourne au vinaigre à l’heure où le conflit est mode de vie.

Le prix Nobel d’économie 2024 vient saluer un trio qui a montré que l’économie (la marche de la maison selon l’étymologie) réclame de bonnes institutions qui favorisent la propriété, la liberté d’entreprendre et l’innovation. D’ailleurs, le Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, sorti en 2004, suite à plus de 110 ans de travail des catholiques sur le sujet, ne faisait qu’énoncer ces mêmes termes, en insistant, bien sûr, sur la solidarité et l’éthique.

Ravi Chaudhry, ancien Président du groupe indien Tata et consultant international respecté vient de sortir ‘Capitalism to Peopleism’ où il prône les mêmes prédicaments et appelle à un leadership évoluant du savoir à la sagesse vers un monde meilleur qui permette d’échapper à l’abime qui se présente à nous. Si je partage son point de vue globalement, l’optimiste que je suis ne peut imaginer le pire malgré qu’il déplore le conflit larvé mentionné précédemment.

Transparence, Ethique, Responsabilité, Reconnaissance, Entrepreneur, fondent l’acronyme TERRE qui nous parle bien alors que nous devons respecter non seulement le climat mais surtout GAÏA, la terre ! Si j’ai essayé de synthétiser tous les travaux mentionnés, j’appelle à encore plus de conscience dans ces 5 piliers chez nos leaders, dans toutes nos institutions, politiques, économiques, sociales et spirituelles, et chez chacun de nous, terriens humains.

©Martin de Waziers