La mort est un nouveau soleil!

PAR MARTIN DE WAZIERS

Décédée il y a 20 ans, Elisabeth Kübler-Ross est la pionnière des soins palliatifs pour les personnes en fin de vie. Elle est connue pour sa théorie des différents stades émotionnels par lesquels passe une personne qui apprend sa mort prochaine. 5 étapes du deuil, mot qui provient du latin dolus, douleur, et qui explique pourquoi la personne qui va à sa mort tente de se raccrocher : déni (non), colère (bordel), marchandage (stop), dépression, acceptation.

Accompagner est mon métier, mon œuvre, ma joie, mon bonheur… et mon expertise de la relation humaine : relation tout d’abord à soi, ensuite à l’autre puis alentour, que l’on appelle l’environnement ou l’écologie (science de la maison, oïkos en grec), l’humanité ou fraternité sociétale, mais aussi la spiritualité, base de toutes les religions ! SPIR, la racine qui indique le souffle de vie ou le sens à lui donner, est dans les mots : respirer, inspirer, esprit, expirer.

Puissance du souffle

Il a rendu son dernier souffle, ne dit-on pas d’un mort ? Nous sommes dépendants de cette puissance du souffle : physique car l’oxygène est notre fuel, amoureux dans le baiser où l’on échange ce souffle tel le bouche-à-bouche de réanimation, spirituel si l’on veut lui donner une dimension immatérielle qui peut mener à la foi. On le retrouve, en chrétienté, dans ce vent du Saint Esprit qui nous apporte ses sept dons à la Pentecôte. Corps, Âme et Esprit sont liés !

Cette année 2024, je pourrais la qualifier d’annus horribilis sur tous les plans économique, politique et social, nul besoin d’en citer les raisons… Mais, je serai plus spécifique car j’y ai accompagné quatre personnes qui m’étaient chères dans la vie et qui le sont encore dans la mort. Leurs initiales combinées s’avèrent être VIVA : V décédée d’un cancer du sein, I parti après une longue paralysie, V décédé d’un cancer du pancréas et A qui s’est donné la mort.

L’importance de pacifier

Donner, drôle de mot, pour parler de cette chose qui nous fait si peur : comment peut-on en faire le don? Tout simplement parce que l’on souffre, on ressent des douleurs qui peuvent être physique (une épaule droite lancinante), psychologique (une complexité grandissante dans la relation humaine) ou spirituelle (vouloir retrouver le souffle, le vrai, celui qui apaise). On comprend alors la liaison avec les soins palliatifs et le mot deuil qui vient de ‘douleur’ !

Vulnérable et mortel, nous le sommes tous, nous le savons. Je m’étais intéressé à la mort, suite à l’accident d’un ami cher qui aurait pu lui être fatal et que j’ai accompagné dans son coma. Mais au travers de 4 morts familiales rapprochées, mon désir a muri d’accompagner des mourants ; j’ai fait 3 ans de soins palliatifs bénévoles dans un hôpital et c’est là que j’ai vu l’importance de pacifier la personne qui se voit poursuivie par la grande faucheuse !

Elle nous rattrapera tous un jour mais quelle chance de vivre car cela nous donne toute opportunité de partager cette énergie d’amour qui fait la relation humaine, le bonheur du quotidien et la certitude que nous serons bercés par elle dans l’au-delà. La paix, la joie et l’amour y ont été représentés par tous ceux qui ont vécu l’Expérience de Mort Imminente ou Near Death Expérience décrite initialement par Raymond Moody dans ‘La vie après la vie’.

Merci d’avoir partagé tes 29 ans !

Le Professeur Jean Bernard, connu pour son expertise en cancérologie et décédé à 99 ans, disait qu’il fallait “ajouter de la vie aux jours lorsqu’on ne peut plus ajouter de jours à la vie.” Merci de ce précieux conseil que je suis à la lettre, personnellement, en famille et avec mes clients. Je citerai ce propos de Gandhi : la vie est mystère qu’il faut vivre et non un problème à résoudre… pour la savourer, il faut savoir la prendre comme elle vient ! La mort au bout ?

On dit souvent que, dans la mort, il y a l’ordre des choses, les générations s’éteignent l’une après l’autre. Cela peut paraître injuste de voir un jeune et beau garçon plein d’énergie nous quitter de son choix… en pleine vie ! Non, tu avais fait ton chemin ici-bas, A, et tu reprends tes droits dans l’au-delà, car tu restes là, avec moi, avec tes parents, tes amis, tes collègues et tous ceux qui t’ont tant aimé de façon inconditionnelle. Merci d’avoir partagé tes 29 ans !

©Martin de Waziers

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5 commmentaires à “La mort est un nouveau soleil!”

  1. Dominique Olgiati 2 décembre 2024 at 07:54 #

    Merci pour cette méditation matinale de Vie avec la mort.
    Dominique Olgiati

    • Martin de Waziers 2 décembre 2024 at 13:15 #

      Merci de votre appréciation, Dr Olgiati ; si la mort est un nouveau soleil, elle est comme l’aube d’une nouvelle journée (or ‘journey’ in american, yes a new journey). Have a great life and, as americans say, the’re only two things you’re sure of, death and taxes! M

  2. Le Houelleur Yann 2 décembre 2024 at 10:33 #

    Que de générosité de votre part, cher Martin de Waziers ! A l’heure où étincèlent déjà les lumières de Noël et où nous nous apprêtons à refermer la page d’une «annus horribilis», nous oublions que des hommes autour de nous vivent déjà, à votre instar, dans l’éternité, grâce à leur foi, grâce aussi au travail de transmission qu’ils effectuent. Je pense à VIVA, troublantes initiales des quatre personnes décédées continuant à vivre dans votre cœur. Et je me demande pourquoi, moi, qui étais promis à la mort, le 6 janvier dernier quand le Samu m’a amené au service des urgences d’un grand hôpital parisien, j’ai pu y échapper. Quelques secondes de plus et je vous faisais ma révérence. Je tiens à vous faire part des rencontres inopinées faites alors que j’étais dans un assez long coma et que je «subissais» une intervention chirurgicale. Pendant plusieurs minutes au moins, j’ai pu retourner au Brésil où j’ai vécu pendant une vingtaine d’années, et j’ai parlé avec de très chers amis qui m’ont adressé quelques recommandations. Je suis parti aussi aux Etats-Unis saluer la statue de la Liberté. Inexorablement je feuilletais ainsi le « grand livre » de ma vie. Et quelques jours plus tard, une infirmière m’a mis devant un fait accompli : «Tenez bon, si vous avez survécu, si Dieu ne veut pas de vous, c’est parce que vous avez une mission à accomplir.» Un an plus tard, alors que subsistent à peine de vagues séquelles de « la » maladie, je vois encore dans cet enchaînement d’événements si traumatisants par lesquels je suis passé, la main d’une divine présence.

    • Martin de Waziers 2 décembre 2024 at 13:11 #

      Content de t’avoir parmi nous, mon cher Yann ! M

  3. Alexandre Lenoir 7 décembre 2024 at 12:51 #

    Touchant propos, Martin. Je retiens en particulier « ajouter de la vie aux jours lorsqu’on ne peut plus ajouter de jours à la vie. ». C’est si beau :)

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