PAR IAN HAMEL
Si le prédicateur a déjà été jugé en appel pour viol en Suisse, en revanche, en France, il ne le sera qu’en mars 2026 devant la cour criminelle de Paris. Or, la première plainte remonte à octobre 2017. Depuis, Tariq Ramadan n’a jamais cessé d’insulter et de harceler ses accusatrices.
PAR IAN HAMEL
Dans son arrêt du 28 août 2024, la Chambre pénale d’appel et de révision de Genève a condamné Tariq Ramadan à trois ans de prison, dont un an ferme, pour viol et contrainte sexuelle pour « la quasi-totalité des faits dénoncés ». Pourtant, sur son site officiel, sous l’intitulé « Vérité sur le dossier, ce qui vous a été caché », Tariq Ramadan continue encore aujourd’hui de dénoncer dans une vidéo de 16 minutes 55 « les mensonges de la plaignante suisse, les contre-vérités ». Il ajoute que toutes ses accusatrices, suisse et françaises, se connaissent et « pendant dix ans ont échangé pour [me] faire tomber ».
Depuis la première plainte déposée en France en octobre 2017, Tariq Ramadan tient toujours le même discours : il est victime d’un complot. Seuls les comploteurs changent. Après avoir brièvement désigné les milieux sionistes, il s’est tourné vers les élites françaises. « Il y avait une sorte d’unanimité entre les politiques, les intellectuels et les médias : ma chute était une aubaine, je dérangeais trop de monde », affirme-t-il. Puis, dans son livre « Devoir de vérité », paru le 11 septembre 2019, il a ciblé « ses pires ennemis ». Parmi eux, Alain Soral, Caroline Fourest, Jean-Claude Elfassi. Il met également en cause le principal site musulman francophone, Oumma.com, qui a refusé de le soutenir. Enfin en 2023, il se choisit un nouvel ennemi, les Émirats arabes unis, qui auraient dépensé des millions, via une société genevoise d’intelligence économique, pour le salir.
Pas l’ombre d’un complot
Tariq Ramadan accuse d’ailleurs “Brigitte“, la plaignante suisse, d’avoir perçu de fortes sommes pour déposer plainte contre lui. « On cite le motif premier de l’argent : des individus l’auraient poussé à agir ainsi contre une importante rétribution », assure-t-il. Le problème, c’est que Tariq Ramadan n’a jamais pu avancer le début d’une preuve. Les magistrats suisses constatent que « cette hypothèse [d’un complot] évoquée dans un premier temps par le prévenu n’est d’ailleurs plus plaidée par la défense au stade de l’appel. A juste titre. Rien dans la procédure ne vient asseoir une telle machination ». Quant aux juges français, dans leur réquisitoire du 7 mars 2024, ils écrivent que « Monsieur Ramadan n’a eu de cesse de dénoncer l’existence d’un complot entre des accusatrices (…) d’un complot ourdi par ceux qu’il appelle “ses pires ennemis“ », mais « aucun élément ne vient corroborer la thèse du complot en permanence rappelée par Monsieur Ramadan ».
Cela n’empêche pas l’ancien professeur de français dans un collège à Genève, aujourd’hui à la retraite, de continuer à harceler et à insulter régulièrement ses accusatrices. La grande majorité des plaintes déposées par ces dernières contre le prédicateur n’ont toujours pas été traitées par la justice. Tariq Ramadan est toujours présumé innocent en Suisse, tant que le Tribunal fédéral ne se sera pas prononcé. En France, le procès pour viols sur trois femmes (viol aggravé sur l’une, et viols sur les deux autres) est prévu du 2 au 20 mars 2026 devant la cour criminelle de Paris. Dans l’arrêt de la cour d’appel, les juges ont acté la « violence » de Tariq Ramadan dans les rapports sexuels, qui « dépassait ce qu’une femme pouvait raisonnablement accepter ». On peut avancer sans se tromper que le petit-fils de Hassan al-Banna, le fondateur des Frères musulmans en Égypte, ira ensuite en appel puis en cassation, ce qui lui fera encore gagner de très nombreux mois, si ce n’est des années.