Vrais ou faux souvenirs?


Le cerveau des individus est complexe, et il lui arrive assez fréquemment de nous jouer des tours.

PAR EMILIE SALAMIN-AMAR

Effectivement, notre petite cervelle est tout à fait capable d’effacer de sa mémoire des évènements traumatiques ayant réellement existé, mais elle est aussi capable de l’inverse. Elle peut s’approprier le contenu d’un récit, photos ou jeux vus sur un écran informatique, et nous faire croire qu’ils font partie de notre vécu, alors qu’il s’agit de données virtuelles. Notre grand ordinateur peut donc nous induire en erreur. 

Mais, comment savoir alors où se trouve la frontière entre le réel et le virtuel? Comment faire le tri? Peut-être en réduisant le temps passé sur ces machines, telles que les ordinateurs, les tablettes, et plus précisément les téléphones portables. Faire des pauses, se nourrir ailleurs, s’alimenter autrement, ce qui revient à dire, de vivre sa propre vie, entrer de plain-pied dans la réalité, tout simplement.

On sait depuis des lustres que la persuasion par la parole favorise l’introduction au cœur du cerveau d’idées et de représentations mentales qui peuvent déterminer ou changer des comportements ainsi que des croyances. L’exemple des fake news et de la théorie du complot qui sévissent sur la toile en sont les exemples. Mais alors, comment faire revenir à la raison un adepte de ces sites et d’informations mensongères? En l’absence de sens critique et d’analyse, la mémoire de ces adeptes peut-elle être altérée à long terme? Est-ce que le comportement de tous ceux qui se gavent d’images numériques est en train de changer, pour ne pas dire, muter? 

Une chose est sûre, c’est que l’appauvrissement du vocabulaire engendre la violence. Les pictogrammes en tous genres ont envahi tous les espaces. Que ce soit dans les rues, sur nos tablettes et ordinateurs ou les téléphones dits intelligents. Et donc, on pourrait dire que l’illettrisme gagne du terrain. Et lorsqu’un individu n’arrive plus à s’exprimer précisément, il y a une incompréhension, entre ses interlocuteurs et lui-même, qui génère forcément de la violence.

On peut prendre en considération que les frontières du réel et du virtuel bougent, se déplacent, se transforment, s’accélèrent grâce à la numérisation du monde réel et concret, ainsi que matériel et abstrait. Si bien qu’entre l’artificiel et le rationnel, il n’y a plus de distinction. Pour certains adeptes inconditionnels des écrans, la réalité devient surnaturelle, incroyable, donc réfutée. On pourrait dire que les nouvelles technologies sont en train de formater les cerveaux à un tel point que l’on est loin de s’imaginer: nous avons affaire à une nouvelle génération de «révisionnistes» des faits de société et de la vie courante. 

Les aficionados de Facebook et autres réseaux, dits sociaux, pensent être devenus les maîtres du monde, les maîtres à penser, et ils contestent en masse toute information émanant des journalistes, de la police ou des autorités. A force de se connecter entre eux, en vase clos, sans aucune ouverture extérieure à leurs réseaux, ils ont fini par croire qu’ils étaient des êtres libres de donner leur avis sur tous les sujets, même ceux dont ils n’ont jamais entendu parler. 

C’est tellement simple de domestiquer un internaute, de formater son esprit, de l’appauvrir, il suffit pour cela de cliquer sur «j’aime». Comme des enfants de classe enfantine, ils collectionnent les petits logos au pouce levé. Certains d’entre eux s’imaginent qu’ils deviendront des stars d’un jour, ou plus. A force de courir après une fausse célébrité, ils ne se rendent pas compte qu’au fil du temps, de clic en clic, de vidéo en vidéo, de photo en photo, sur la route de l’informatique à tout prix, ils perdent leurs neurones les uns après les autres. Que restera-t-il dans leur cerveau? Un immense vide neuronal. Arriveront-ils un jour à ne plus confondre le réel et la réalité? Le réel et la virtualité? Le réel étant ce qui est, en tant que un et absolu, alors que la réalité en est la représentation physique du moment. Quant à la virtualité, ce n’est que du rêve, du vent.

L’Essor

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