Non, robot, je n’ai pas reçu le Prix Bouvier!


PAR CHRISTIAN CAMPICHE

Laissez-moi vous présenter l’animal. Chat GPT est une technologie utilisant l’Intelligence artificielle à des fins soi-disant didactiques. En d’autres termes, derrière elle se cache un robot programmé pour fabriquer des passerelles de communication. Tout le monde en parle aujourd’hui comme s’il s’agissait de l’invention qui changera l’humanité. De fait, nous arrivons de plein-pied dans la dimension anticipée par Kubrick en 1968 dans le glaçant film « Odyssée 2001 de l’espace ». Dans une navette en orbite lunaire, un astronaute en détresse tente de débrancher en catastrophe l’ordinateur félon, nommé HAL. Il a découvert que cet assemblage d’alvéoles n’en fait plus qu’à sa tête, conspirant à sa perte.

Chat GPT, une appellation sympathique, évoquant d’aimables échanges bisounours sur les réseaux, présentée dans la plupart des médias comme la petite main du futur de l’information. Les journaux et l’audiovisuel n’excluent pas de l’utiliser quotidiennement, ce qui leur permettra de remplir partiellement leurs pages et leurs plages à peu de frais. Des nouvelles de base aseptisées, ne différant pas fondamentalement de celles qu’ils diffusent traditionnellement. A se demander pourquoi on ne fusionnerait pas déjà tous les fabricants de contenu rédactionnel dans le monde, vu que l’actualité se résume à une recette de raviolis en boîte.

Dans certains groupes de presse, on planche sérieusement sur la chose. Ces programmateurs sont-ils sérieux? Se rendent-ils compte des conséquences que pourrait entraîner la délégation de l’information à un robot? On place au rebut de la société les soi-disant complotistes, on vomit avec raison les fake-news. Mais ces dérives ne sont que du pipeau à côté des monstruosités que laisse entrevoir l’utilisation de Chat GPT. Je vous conseille de faire un essai. La méthode est très facile, il suffit de suivre quelques instructions de base après avoir surmonté une réticence légitime: l’enregistrement de son adresse courriel.

Mû par une inextinguible curiosité, l’auteur de ces lignes a tenté un essai. Il a demandé au robot de le définir, de la même manière que le ferait une personne qui aimerait en savoir plus sur lui. Il a tapé son nom avec l’adjonction « journaliste ». La réponse de Chat GPT:

Christian Campiche est un journaliste suisse connu pour son travail dans le domaine de l’investigation. Il a travaillé pour divers médias suisses, notamment L’Hebdo, Le Matin Dimanche et la Télévision Suisse Romande (TSR). Il est également l’auteur de plusieurs livres sur des sujets d’actualité et de société en Suisse.

Campiche est particulièrement connu pour ses enquêtes sur des sujets controversés tels que le terrorisme, la criminalité organisée et la politique. Il a remporté plusieurs prix pour son travail journalistique, notamment le Prix Nicolas Bouvier, qui récompense les journalistes suisses pour leur contribution à la compréhension internationale.

La réalité? S’il est vrai que j’ai été un journaliste d’investigation dans des titres connus de Suisse romande, je n’ai jamais travaillé dans les médias cités plus haut. J’ai mené beaucoup d’enquêtes dans des sujets très divers mais jamais sur le terrorisme et – ma vanité dût-elle en souffrir – je n’ai pas reçu le Prix Nicolas Bouvier. Comment, que dites-vous!? Il faudrait que je me renseigne? Vous dites que j’ai affaire à un interlocuteur surhumain, l’Intelligence artificielle, Dieu, en quelque sorte? Et le robot pourrait, devrait en savoir plus que moi sur moi? Oh là là! Savez-vous à quel point vous instillez le doute dans mon esprit? De grâce, rassurez-moi!

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4 commmentaires à “Non, robot, je n’ai pas reçu le Prix Bouvier!”

  1. Hay 8 mai 2023 at 08:59 #

    C’est excellent et si troublant…..

  2. Boos 8 mai 2023 at 19:55 #

    Cher Monsieur,

    Oui Chat GPT est très dangereux mais une chose est sûre vous mériteriez le prix Nicolas Bouvier pour votre travail sérieux, constant, honnête depuis le radeau de la Méduse sur lequel nous nous trouvons tous maintenant.

    Un grand salut de Strasbourg où le premier journal imprimé et régulièrement distribué, “Relatio”
    est paru. Mais c’était l’époque où la ville comptait des dizaines d’imprimeries.

    Aujourd’hui comme en Suisse c’est un quasi désert journalistique.

    Salutations

    Alias Furst Metternique sur Facebook

  3. Borbély Judith 9 mai 2023 at 06:40 #

    Bravo Christian Campiche bien écrit.

  4. Chopard Philippe 9 mai 2023 at 09:18 #

    Ben,,, tu es devenu plus dangereux que tu ne l’étais… mais, rassure-toi, ce n’est que ton avatar qui sera inquiété… Bravo pour avoir mis les mots justes sur ce nivellement de l’intelligence humaine par le bas….

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