PAR PIERRE JEANNERET
Lui-même fils d’un photographe, le Sédunois Philippe Schmid (1932-2002) a inlassablement parcouru son canton pour ses 22’000 reportages, qu’il a légués à la Médiathèque Valais. C’était l’âge d’or de la photo de presse. On y trouve donc d’innombrables sujets : accidents, incendies, matches de foot, manifestations culturelles, mouvements sociaux (par exemple les 150 tonnes de tomates jetées dans le Rhône par les agriculteurs en colère à Fully en 1950), et bien sûr beaucoup d’événements religieux. Les prises de vue de Philippe Schmid illustrent un Valais encore très traditionaliste, où l’on rencontre nombre de nonnes, de prêtres en soutane et de costumes folkloriques. Mais elles montrent aussi un canton qui est en train d’opérer un saut dans la modernité. D’où des images fortement contrastées : l’une d’elles a été prise pendant la Fête-Dieu de 1986 et on y voit des femmes en costume traditionnel à côté d’une vacancière (une touriste ?) en short très court et cigarette à la main. Sur une autre, assez spectaculaire, un hélicoptère treuille une vache en montagne. Néanmoins le Valais moderne reste fidèle à un certain cléricalisme : un curé en soutane bénit des planeurs. L’exposition fait voir aussi l’évolution des vêtements : les nurses de la pouponnière qui posent sagement en 1959 portent une cravate et sont chaperonnées par une sœur catholique en cornette. Elle constitue donc un témoignage sur toute une époque.
Philippe Schmid n’était peut-être pas un génie de la photographie. Il ne se considérait lui-même pas comme un artiste. Mais ses cadrages sont toujours réussis. On admirera aussi sa maîtrise du noir-blanc. Les photos révèlent parfois un certain humour : ainsi le panneau « Tous dépôts interdits » à l’entrée d’un cimetière. La Médiathèque propose également une réflexion sur la photo de presse, souvent tentée par le voyeurisme. Enfin les commentaires de l’ethnologue Bernard Crettaz invitent à penser que respect des traditions et inscriptions dans le présent peuvent fort bien coexister. Notons enfin que Philippe Schmid s’est engagé pour la défense des droits des journalistes. Une exposition de quelque 250 photographies qui devrait être vue par tous les Valaisans… mais aussi ouverte aux autres.
« Les hauts et les bas en Valais. Philippe Schmid reporter d’actualité », Médiathèque Valais, Av. de la Gare 15, Martigny, LU-SA 13.00-18.00, jusqu’au 23 mars.
