Médusément vôtre – Presse romande assassinée, Dick Marty et le séquestre des fonds russes, Suisse-OTAN

Genève, rien ne va plus. En mai dernier, la république du bout du lac annonçait la disparition de sa manifestation historique, le salon de l’automobile, créé en 1905. Le 26 août, la commémoration des 75 ans des conventions de Genève connaissait un flop et, vendredi, tombait le couperet fatal à propos de l’organisation du prochain concours Eurovision de la chanson, attribué à Bâle. Last but not least, une épée de Damoclès pèse sur la “Tribune de Genève”, la belle Julie, sérieusement menacée après l’annonce d’une nouvelle restructuration chez l’éditeur Tamedia.

Le groupe zurichois qui contrôle la moitié de la presse romande entend désormais axer sa stratégie d'”attaque” à partir du logo “24 Heures”. Entendez: créer un seul titre, de Fribourg à Genève, imprimé à Berne! Ainsi se réaliserait la prédiction parue le 6 décembre 1998 dans l’hebdomadaire “Info Dimanche”, sous la plume du soussigné: “Exit La Suisse, exit le Journal de Genève, détruits par la mégalomanie et les règlements de compte. Une sort que la Tribune de Genève n’a évité de justesse, soit dit en passant. Sans l’intervention du lausannois Edipresse, il y a belle lurette que le quotidien serait mort de sa belle mort.” Comble d’ironie, ladite TG avait été jusqu’à censurer en 2010 le livre “info popcorn” cosigné par votre serviteur et dont un chapitre portait ce titre: “La presse romande assassinée”.

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Peu de temps avant sa mort, survenue en décembre 2023, l’ancien procureur tessinois Dick Marty publiait son livre Verità irriverenti – Riflessioni di un magistrato sotto scorta / Vérités irrévérencieuses. Réflexions d’un magistrat sous escorte, Edizioni Casagrande 2023. En haut lieu en Suisse, on s’est bien gardé depuis de relayer les réflexions de l’ancien rapporteur du Conseil de l’Europe, et pour cause. Dans ce passage, le juriste qui termina son existence sous haute protection policière désapprouve le séquestre des fonds russes (trad. infoméduse):

Les sanctions financières sont légitimes si elles s’appuient sur des bases légales solides. On peut demander simplement que les fonds des soi-disant oligarques russes russes soient confisqués et utilisés pour la reconstruction de l’Ukraine. Mais cela n’en constitue pas moins manifestement une violation de l’un des principes essentiels d’un Etat fondé sur la prééminence du droit. Le concept d’oligarque n’est pas défini juridiquement et cela pose déjà un problème. (…) Extrêmement délicate est la situation de la Suisse, dans la mesure où celle-ci entend rester cohérente avec sa proclamée neutralité.

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Mme Amherd flirte avec l’OTAN. Elle a le droit d’avoir des passions. Le problème c’est son statut de présidente de la Confédération. Cheffe de l’armée, certes, mais symbole du pays surtout. Un Etat qui a fait de la neutralité sa raison d’exister au cours des deux siècles précédents. Remettre cette vocation en question, comme ça, parce que la ministre centriste en exprime le caprice pour le plus grand plaisir de l’industrie de l’armement, relève de l’irresponsabilité pure et simple. D’autant que Mme Amherd ne fait rien pour dissiper les rumeurs de son départ à la fin de l’année. Après moi le déluge… Et qui est cette Katja Gentinetta, dont “La Liberté” nous annonce qu’elle a rédigé le rapport demandant l'”assouplissement” de la politique de neutralité de la Suisse au nom d’une commission d’experts ad hoc? Personne n’a l’air de se poser la question. Katja Gentinetta, lit-on en tapant son identité sur un moteur de recherche, est “une philosophe politique et économique suisse. Depuis 2011, elle travaille en tant que journaliste et chroniqueuse indépendante”. De sa légitimité politique, pas un mot. On est devenu bien confiant, en Suisse!

Christian Campiche