Combien de graphiques n’avions pas montré – nous économistes et analystes, dont moi-même – démontrant que la santé de l’économie américaine pulvérisait celle de l’Europe ? Et combien d’indices officiels de l’inflation n’avons-nous pas copié et collé attestant, trimestre après trimestre, que les pressions sur les prix s’atténuaient lentement mais sûrement ? Pourquoi, enfin, les médias américains – qui se veulent sophistiqués et avant-gardistes – ont-ils négligé d’informer leurs concitoyens que la situation aux Etats-Unis était nettement plus enviable que celle que nous subissons en Europe ? Ceux d’entre nous ayant connu les épisodes inflationnistes des années 1970 savaient pourtant bien qu’inflation rime avec troubles et chamboulements.
En réalité, les augmentations des salaires réels (en données corrigées de l’inflation) n’eurent quasiment aucun impact psychologique car – aux Etats-Unis comme chez nous – la population n’en a rien à faire des indices officiels publiés par les administrations. S’il y a un enseignement sur le plan macroéconomique à tirer de l’élection présidentielle américaine de la semaine dernière, c’est que l’inflation est un phénomène ressenti sur une base cumulée, jour après jour, mois après mois, courses au magasin après courses. Aux politologues de se rendre compte que le citoyen n’a cure des indices de l’INSEE ou du bureau US des statistiques, car lui se construit son opinion de la cherté des prix au fil de ses emplettes, et ne se sent pas concerné par ce que les experts lui affirment. Un consommateur n’est donc pas un économiste.
La stabilité des prix avant l’emploi!
Autre enseignement précieux: hors crise économique aigue et dépression, l’inflation affecte tout le monde quand le chômage, pour sa part, ne touche qu’une petite partie de la population. Un exemple: en dépit de la méga-crise de 2008, 90% des américains avaient toujours leur job.
Nous devons donc collectivement reconnaître un fait qui semble nouveau et qui remettra en question certains dogmes, à savoir que les citoyens occidentaux préfèreraient une croissance plus faible si le prix à payer est la maîtrise de l’inflation.
En d’autres termes : la stabilité des prix passe avant l’emploi !
L’économie US se portait formidablement bien
Il est un troisième enseignement à destination des futurs candidats aux prochaines élections, si l’on en croit les multiples analystes américains. L’inflation est de la faute du président, du gouvernement, tandis que la croissance et le chômage sont des phénomènes qu’ils ne maîtrisent pas, dépendants de cycles et de tendances lourdes intimement liés à la globalisation.
L’économie US se portait formidablement bien: 3% de croissance sur les 9 derniers trimestres, et des influx massifs de liquidités internationales en direction du pays! Peu importe en réalité, car le mérite en reviendrait aux Musk, aux Bezos, aux grands et aux petits entrepreneurs, mais pas à l’exécutif.
Tandis que l’inflation, elle, fut entièrement imputable à Biden et à ses acolytes. A bon entendeur…