Je suis Jésus, confie-moi tes péchés, mon fils! L’église Saint-Pierre de Lucerne a installé en son confessionnal un écran avec le robot « Deus in Machina », hologramme restituant le personnage du Messie. « Artistique », comme l’affirme la réclame? Saintement racoleur, en tout cas. Une fidèle citée par la presse trouve même l’avatar très « cool ». Il ne manque plus qu’Elon Musk pour l’adouber. L’égal de Dieu sur Terre, qui compte sur l’intelligence artificielle pour mâter les mécréants.
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Qu’ont en commun Charles Péguy, Romain Rolland, Pierre de Coubertin, Raymond Poincaré, en dehors du fait que deux d’entre eux sont des écrivains de la première moitié du 20e siècle? Ils ont enseigné à l’Ecole supérieure de journalisme de Paris. Créée en 1899 par la romancière Jeanne Weill, alias Dick May, cette noble institution s’enorgueillit d’être la plus ancienne école de journalisme au monde. Parmi les élèves illustres, on note les noms de Gérard de Villiers et Léon Zitrone. Depuis une vingtaine d’années, elle connaissait des difficultés financières. Jusqu’à ce que, le 15 novembre dernier, soit annoncé son rachat par un groupe de magnats actifs dans le domaine des médias: Arnault, Bolloré, Dassault, pour n’en citer qu’une poignée. La tête pensante de l’opération serait cependant un personnage beaucoup moins connu, Vianney d’Alençon, présenté dans le dictionnaire en ligne comme un entrepreneur catholique traditionaliste de 38 ans, propriétaire d’une forteresse médiévale dans le Massif central, le château de Saint-Vidal. Les futures plumes de « Point de vue » ont peut-être leur débouché tout trouvé. Vive le Roy!
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« La crise de la presse ». Les protagonistes de la Revue de Lausanne ne croyaient pas être si prophétiques lors de l’élaboration du programme de cet événement théâtral et musical de la métropole vaudoise. Le septième du genre, un must qui fait salle comble à chaque représentation, organisé pour la première fois au Pavillon Naftule, « théâtre éphémère et inédit » monté à Bellerive, à deux pas du chantier naval. Lieu prédestiné, en troublante harmonie avec le thème du spectacle, la réduction de la voilure dans les journaux Tamedia. « On pensait que ce serait un bon sujet, on pensait pas avoir raison à ce point! », commente la troupe de 12 personnes à qui l’actualité a donné un nouvel écho. Le 17 septembre dernier, la direction du groupe zurichois le claironnait encore: « le rédacteur en chef du quotidien vaudois, Claude Ansermoz, prendra la tête de la nouvelle rédaction romande ». Hier, ce journaliste signait son dernier éditorial à « 24 Heures ».
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« Un échec cuisant », commentent les oeuvres d’entraide. Mais Joe Biden trouve que la COP est un « pas important » et Ursula von der Leyen pense que nous entrons dans « une nouvelle ère ». Le ministre Albert Rösti, lui, est tout aussi positif: « la COP est un succès, nous sommes satisfaits ». Ils n’ont pas tort: le tournant énergétique a été amorcé durablement, les carnets de commandes sont pleins, les centrales nucléaires poussent à nouveau comme des champignons, le solaire gangrène la ville et Tesla grille la politesse aux voitures thermiques sans nuire aux puits pétroliers. Le climat est mort à Bakou mais l’économie et Greta crient cocorico.
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Aux échecs, un Chinois et un Indien s’affrontent pour le titre de maître du monde. Symbolique des nouveaux rapports de force sur la planète. On est loin de la splendeur de la guerre froide. Fischer défiant Spassky en 1972, l’Amérique contre la Russie. Ave César, ceux qui ont survécu te saluent!
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Arrestation à l’aéroport d’Alger, le 16 novembre dernier, de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. L’Académie française, des intellectuels et autres Nobel sont intervenus pour réclamer la libération immédiate de cet opposant aux dictatures, critique de l’islamisme intégriste. Les milieux gouvernementaux relaieront-ils l’indignation? Macron a marmonné quelques protestations et la Suisse se mure dans un silence assourdissant.
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La banane de Cattelan. Elle est grasse, elle est bonne, elle se mange après avoir été accrochée à un mur avec du scotch. Figurez-vous que je l’ai achetée 6,2 millions de dollars à l’épicerie du coin. Il faut bien encourager les petits commerçants! Lesquels se transforment en galeristes opulents à leurs heures. La banane de Maurizio Cattelan, tout est dans le mode d’emploi. Si je suis à la lettre les consignes de l’artiste, apprêter à sa manière chaque banane que je consommerai pendant le restant de mon existence, l’ « œuvre » que je viens d’acquérir prendra toujours plus de valeur aux enchères. Esclave d’une banane, mais quels gains! Cattelan, l’art au service de la pub. Cattelan et Manzoni, la banane et la merde d’artiste, même combat!
Christian Campiche
Excellent ton résumé des évènements clés, tu as dû aller à cette fameuse école, haha… Martin
La banane de Cattelan … La représentation parfaite de la médiocratie totalitaire néolibérale dont Christie’s et Sotheby’s sont ‘les thuriféraires’ obligés !