Quand le Parti communiste français était antisémite 

Depuis le début de la guerre à Gaza, La France Insoumise (LFI) affiche une ligne radicalement anti-israélienne. Tout en prenant la précaution de ne pas franchir la ligne jaune, l’organisation d’extrême gauche flirte avec l’antisémitisme. Ainsi, Jean-Luc Mélenchon dit de Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée nationale – qui est juive – qu’« elle campe à Tel-Aviv », faisant clairement référence au « Juif errant ». En revanche, après la Seconde Guerre mondiale, le Parti communiste français ne prenait pas autant de précautions pour s’en prendre aux Juifs, raconte le journaliste Clément Weill-Raynal, auteur de « La gauche antisémite, une haine qui vient de loin » (*).    

PAR IAN HAMEL

La gauche ne défend-t-elle pas systématiquement les opprimés, et donc les Juifs ? Souvenons-nous de l’Affaire Dreyfus, des années 30 quand l’extrême droite était violemment antisémite, du comportement des résistants sous l’occupation allemande. Toutefois, il n’en a pas toujours été ainsi. Le Parti communiste français (PCF), inféodé à Moscou, a cautionné après la Seconde Guerre mondiale sa propagande antijuive. Il a ainsi justifié « le procès truqué de Prague lors duquel quatorze dirigeants du parti frère tchécoslovaque – dont onze étaient juifs – furent accusés de “complot sioniste“, écrit l’auteur du livre. Le PCF a aussi approuvé le pseudo « complot des blouses blanches » à Moscou, lorsqu’un groupe de « médecins juifs soviétiques furent arrêtés à Moscou et accusés d’avoir cherché à empoisonner Staline ».  

Le PCF va même faire du zèle en marginalisant systématiquement les résistants juifs en France. Choisissant une ligne « nationaliste », les communistes décident de glorifier les militants « de souche » et demandent aux « immigrés » de l’organisation de se faire oublier. Il s’agit de ne pas apparaître aux yeux des Français comme un « parti de métèques ». Jacques Duclos, le numéro 2 du parti, explique aux adhérents juifs du PCF qu’ils n’auront pas de promotions et que la priorité sera donnée aux vrais Français. On leur suggère même de repartir dans leurs pays d’Europe de l’Est qu’ils ont quittés pour fuir les persécutions antisémites… Le grand-père de Yaël Braun-Pivet, première femme présidente de l’Assemblée nationale, était un tailleur juif polonais qui s’était réfugié à Nancy dans les années 30. Il a été médaillé de la Résistance.   

L’Humanité et le nez crochu des Juifs      

La haine des juifs ne s’arrêtait pas en aussi bon chemin. En 1947, les ministres communistes sont exclus du gouvernement français issu de la Libération. Ils vont alors prendre pour cibles les ministres juifs, à commencer par Léon Blum, accusé d’être « vendu aux Juifs de New York ». Clarté, le journal des étudiants communistes, va jusqu’à traiter Blum de « domestique qui vend sa patrie aux trusts et aux banques de Wall Street ». Pierre Mendès France n’est qu’un « petit Juif peureux ». Quant aux cinéastes et acteurs qui ont quitté la France sous l’Occupation pour aller tourner des films aux États-Unis, ils sont carrément accusés d’être des « collabos » du capitalisme hollywoodien. « Cette inversion des rôles permet dans le même temps de parfaire la respectabilité de toutes les vedettes, tous les réalisateurs et producteurs qui se sont accommodés du régime de Vichy », souligne Clément Weill-Raynal, journaliste audiovisuel.      

Résultat, des vedettes comme Jean Marais et Simone Signoret « qui ne furent pas des modèles de résistance à l’occupant nazi » vont défiler en janvier 1948 aux côtés des compagnons de route du PCF et des syndicalistes de la CGT. Bref, les communistes d’après-guerre ne font décidément pas dans la dentelle. Non seulement, les ministres juifs sont systématiquement représentés avec un nez crochu proéminent dans le quotidien L’Humanité, mais le parti n’hésite pas à les accuser de tous les maux : « Les noms de Blum, Moch et Mayer ne sentent bon ni la Beauce, ni le Berry, mais évoquent plutôt tout ce qui depuis des siècles exploite le labeur français, vit de la fatigue française, fait des fortunes sur la misère des Français ».  

A côté Jean-Luc Mélenchon joue effectivement petit-bras. En parlant le Pierre Moscovici, ancien ministre de l’Économie en France, et ancien Commissaire européen à l’Économie à Bruxelles, il le traite de « petit intelligent qui a fait l’ENA » et qui a « un comportement de quelqu’un qui ne pense plus en français, qui pense dans la langue de la finance internationale ». Sous-entendu, il serait lui aussi un « Juif errant ». Le père de Pierre Moscovici, ancien militant du Parti communiste roumain, a fui son pays en 1947 pour se réfugier en France.  

(*) « La gauche antisémite, une haine qui vient de loin », par Clément Weill-Raynal, L’Artilleur, 342 pages     

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