Les responsables de l’entreprise de construction bulloise JPF ne s’attendaient pas à un accueil aussi contrasté, mardi soir 21 mai 2013 à Château-d’Oex.
PAR CHRISTIAN CAMPICHE
Dans la salle comble du cinéma Eden, ils étaient venus présenter l’avant-projet d’un Centre artisanal du Pays d’En-Haut (notre image de synthèse), symbolisé par l’acronyme CAPE. Une appellation à vrai dire trompeuse car, s’il voit le jour, ce bâtiment de plusieurs étages à toiture plate de 68 mètres de longueur aura d’abord pour vocation d’être une vitrine de petits entrepreneurs locaux, ferblantiers, peintres et autres sous-traitants souffrant d’un emplacement excentré. Le CAPE devrait s’étaler le long de la route cantonale, au pied du chef-lieu damounais, sur une surface de 9500 mètres carrés, actuellement occupée par une déchetterie.
Sur le papier à tout le moins, la physionomie du CAPE tient davantage d’un bâtiment industriel, tel qu’on en recense par milliers à la périphérie des villes, que d’une construction répondant aux canons du pittoresque patrimoine damounais. Il n’en fallait pas plus pour que ce malentendu provoque nombre d’interventions critiques portant moins sur l’utilité que sur l’esthétique du projet dessiné par un bureau d’architectes bullois. «Hangar», «cube», «parallépipède»: les comparaisons peu flatteuses ont fusé de la part d’habitants de la commune sensibles aux atouts rupestres de la vallée. «Les touristes viennent ici pour l’image. Il y a déjà 115 appartements à vendre, vous allez continuer à faire fuir les résidents», s’est émue une intervenante. «Ce type de bâtiment est parfait à Bulle mais n’est pas adapté à Château-d’Oex», a osé un autre participant.
Des remarques ont aussi porté sur l’unicité du choix architectural. Déplorant le caractère compact, peu compatible avec le style de l’habitat local, une personne a proposé un concours mettant en concurrence plusieurs projets. Elle n’a pas obtenu de réponse.
Pour sa défense, le directeur de JPF, Jacques Pasquier, a répondu que son but n’était pas d’enjoliver le tableau mais de présenter le projet le plus réaliste possible. Box, modules, cafétéria, garages: les termes qui reviennent le plus souvent dans sa présentation ne laissent planer aucun doute sur l’affectation du CAPE. D’un coût global de 20 millions, parrainé par le groupe électrique Gruyère Energie et le canton de Vaud, ce concept se veut une réponse pragmatique aux besoins des PME locales dont quelques représentants, mardi soir, ont confirmé leur intérêt pour le projet.
«L’économie des Alpes est en grande difficulté. Les investisseurs extérieurs sont là, la nécessité d’une densification et d’un centre de compétences n’est pas à prouver», a lancé le syndic Charles-André Ramseier. Lequel a appelé au «bon sens» et à un esprit de «compromis». Fort de ce soutien, JPF n’entend pas traîner en besogne. Un plan de quartier est prévu fin 2013, la mise à l’enquête début 2014, le début des travaux à l’automne 2014 et la fin des travaux fin 2015.
Une échéance rapprochée en soi mais qui n’empêchera beaucoup d’eau de la Sarine de couler sous les ponts.