La fleur au fusil, les députés vaudois ont voté l’entrée en matière sur la loi qui crée la fondation de droit public du futur Pôle muséal. Qui ose encore s’opposer à la destruction de la halle aux locos?
PAR CHRISTIAN CAMPICHE
C’est la députée socialiste Vuarnoz qui l’a dit: « le placement central du futur Pôle muséal suscite l’enthousiasme de TOUS les Vaudois ». Si elle a parlé à l’ensemble de la population du canton, faudra qu’elle nous donne sa recette! Quel talent d’ubiquité!
Quel flair également, celui du député libéral Surer, lequel affirme de son côté que le projet de Pôle muséal jouit d’un « soutien populaire constant ». Dispose-t-il d’un sondage secret du Conseil d’Etat?
Le même Jean-Marie Surer a eu au moins le mérite de la sincérité, lors du premier débat que le Grand Conseil vaudois a consacré au Pôle muséal, mardi 11 mars 2014. Il a annoncé que le quartier de la gare de Lausanne sera « entièrement redéfini ». Voilà qui est clair et ne donne plus beaucoup d’espoir aux échoppes et bistroquets qui faisaient le charme de cette région.
De toute façon, les opposants au Pôle muséal peuvent aller se rhabiller, ils n’ont rien compris à l’enjeu. Comment ces « irréductibles » (Jean-Marie Surer) n’ont-ils pas saisi que ce projet est destiné à « affirmer l’identité culturelle » du canton (Vassilis Venizelos, vert)? Parfaitement, de la capitale aux « confins de l’empire vaudois » (Philippe Randin, socialiste)! De la sorte, les Vaudois n’auront plus besoin de prendre le TGV pour Paris, les collections Vallotton seront à portée de billet de métro lausannois.
Quels sombres rabat-joie, ces opposants! Et dire qu’ils s’inquiètent pour les finances du canton! 200 millions, sans compter d’inévitables dépassements, mais voyons, pour la Culture avec un grand C, on ne compte pas, Monsieur, on ne compte pas! D’autant que les fonds proviendront en partie de généreux mécènes. En partie, seulement. Une toute petite ou une grande partie? Le groupe vert’libéral au Grand Conseil demande une pause de réflexion à l’issue de la première phase, la construction du Musée cantonal des Beaux-Arts à proprement parler. Avant de passer à la deuxième phase, celle de l’aménagement du Musée de l’Elysée et du Mudac, ne conviendrait-il pas de faire le bilan de la dépense en regard des réserves dont disposera le budget cantonal? 100 millions supplémentaires, il faudra quand même les sortir de la caisse. Qui nous dit que demain sera aussi prospère qu’aujourd’hui?
Le second débat que le Grand Conseil consacrera au projet de Pôle muséal, mardi 18 mars prochain permettra de juger de la portée de l’argument financier. En l’état, pas grand monde a l’air de s’en soucier. Le Pôle muséal nous enthousiasme, clament en choeur les députés. A une voix discordante près, celle du centriste veveysan Jérôme Christen. Le Conseil d’Etat « s’assied sur l’avis des experts » qui avaient choisi le site de la Riponne. Quant aux architectes qui ont essayé d’imaginer une formule permettant de sauver le site protégé de la halle aux locomotives, ils ont sué en vain, ils ne sont rien d’autre que des cocus. Bref « les dés sont pipés, la messe est dite ».