LRTV, c’est oui, et alors?

C’est donc un oui du bout de lèvres pour la loi sur la révision de la radio et de la télévision (LRTV).

PAR PIERRE NOVELLO

Le résultat met fin à un suspense presque insoutenable tout au long de l’après-midi, rappelant quelque peu la votation du 9 février 2014. En faisant presque oublier qu’il ne s’agit que de réformer la perception d’une redevance… Ce score très serré traduit-il un rejet du modèle de la SSR? On peut s’interroger. Mais on peut imaginer qu’une tranche non négligeable de la population a été dérangée par les nouvelles modalités de cette perception, en particulier sur les entreprises. On n’a en effet pas besoin d’être un anti-SSR primaire pour mettre en question l’idée que les personnes professionnellement actives utilisent massivement un média à vocation régionale sur leur lieu de travail. L’argument d’une double imposition n’était pas dénué de fondement. Les défenseurs de la révision ont affirmé qu’il s’agissait finalement de sommes assez modestes. Ce qui est vrai. Mais ce n’est pas une raison. On vote aussi sur des principes.

Pour l’initiative sur les successions, le rejet est suffisamment fort pour qu’on n’ait pas vraiment envie d’en rajouter. Même les Vaudois, qui connaissent un impôt de succession en ligne directe à partir de 250’000 francs, n’en ont pas voulu. Les opposants ont peut-être exagéré les risques que cette initiative faisait courir à l’économie, en entravant la transmission des entreprises familiales. Mais c’est le genre de phénomène qu’il est toujours difficile d’évaluer a priori. Et cela a certainement inquiété bon nombre de Suisses alors qu’il est facile de se représenter la charge que constitue le franc fort pour les entreprises. Sans parler des effets à venir de cette fameuse votation du 9 février pour recruter la main-d’œuvre qualifiée qui leur est tellement nécessaire.

Enfin, on peut penser que l’idée d’imposer les héritiers en ligne directe aux mêmes conditions que n’importe quel autre bénéficiaire, qu’il soit apparenté au défunt ou non, n’était pas forcément du goût d’une majorité de la population. D’ailleurs, est-ce forcément illégitime de vouloir transmettre intégralement son patrimoine à ses enfants, d’autant plus qu’il aura déjà été ponctionné chaque année par l’impôt sur la fortune?

Pierre Novello est journaliste économique indépendant.

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2 commmentaires à “LRTV, c’est oui, et alors?”

  1. Schindler 15 juin 2015 at 16:30 #

    Votre analyse des raisons de l’opposition à la LRTV me paraît un peu courte. L’argument de la double imposition n’a probablement pas pesé lourd dans le vote.Vous savez bien que les opposants (USAM, Tamedia, Ringier, etc.) veulent surtout redéfinir le service public en limitant les moyens de la SSR pour obtenir une plus grande part du marché publicitaire.

  2. Pierre Novello 15 juin 2015 at 19:42 #

    Merci pour votre commentaire.
    Sur le fond, je suis tout à fait d’accord avec vous sur l’enjeu et la lutte pour le marché publicitaire. Mais je m’interroge tout de même sur les motivations des votants, qu’on ne peut évidemment limiter à un seul argument. Et je ne suis pas si sûr de l’influence des grands éditeurs alémaniques, notamment, dans le débat. Le grand public est-il vraiment préoccupè des problèmes que connaît la presse ? Très franchement, j’ai quelques doutes à ce sujet.
    Dans les échanges de dimanche après-midi, certains évoquaient une réaction viscérale anti-Billag. La redevance est tout de même loin d’être symbolique pour tous les budgets. Certains n’ont pas manqué de relever la contradiction, puisque le oui va permettre de la baisser pour tous les ménages.
    Autre paradoxe qu’on peut mentionner : même en Suisse romande, où d’après Gilles Marchand, 80 % de la population (si j’ai bien noté) serait très heureux des programmes de la RTS, comment se fait-il que la révision ne soit acceptée que par environ 60 % des votants ? On peut expliquer cet écart par la faiblesse de la participation, mais pourquoi dans ce sens là et avec cette ampleur ? On a peut-être trouvé un nouveau clivage : votants contre abstentionnistes…

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