Trafic aérien, l’incohérence des subventions


PAR GERARD BLANC

Une lueur d’espoir dans le ciel ?

En Suisse, l’Etat prévoit de subventionner Swiss sans contrepartie, mais se montre plus modeste pour easyJet. En France, un prêt de 7 milliards d’euros sera accordé à Air France/KLM, mais en échange d’une réduction de 50% des émissions de CO2. 

Depuis le début du confinement et l’arrêt d’environ 90% des vols, le sujet de la décroissance du trafic et, en particulier, celui des compagnies lowcost semble occuper les esprits de certains  gouvernements. On aurait pu s’attendre à ce que tous fassent la sourde oreille et ne soient plutôt partisans du « business as usual »,  mais le gouvernement français pourrait donner quelque espoir pour une reprise repensée vers une défense de l’environnement.  Intention louable ? Greenwashing  politique ?

Comme on l’a vu récemment, le gouvernement australien a refusé  d’accorder une quelconque aide financière à Virgin Australia qui est aujourd’hui en cessation de paiement. La raison invoquée par le département des Finances de l’Australie était de limiter les subsides aux compagnies appartenant aux seuls investisseurs australiens. En France,  Air France-KLM, qui représente l’un des plus grands groupes de transport aérien mondial, vient d’obtenir de Bruno Lemaire, ministre des Finances,  un prêt bancaire de sept milliards d’euros avec l’approbation de l’Union européenne. Le gouvernement néerlandais prévoit une rallonge entre deux et quatre milliards d’euros. Toutefois, le gouvernement français demande en contrepartie qu’Air France soit plus respectueuse de l’environnement en réduisant ses émissions de CO2 de 50%  d’ici 2024 sur le territoire domestique français, notamment en supprimant ses lignes internes lorsque des alternatives par TGV sont possibles avec une durée de parcours par train de 2h30.  Air France sera notamment contrainte à ne plus vendre de billets entre Paris (Roissy ou Orly) et Rennes, Nantes, Bordeaux et Lyon. Cette condition aura toutefois pour exception les vols permettant une correspondance de et pour des destinations plus lointaines depuis les grands hubs tels que les aéroports de Paris, de Nice ou de Lyon. De plus, Air France devra aussi mettre en place un plan concret de mutation vers l’utilisation de carburant non fossile d’ici à 2025. 

En Suisse, les deux principales compagnies aériennes, à savoir Swiss Airlines et easyJet Switzerland, vont être aidées par la Confédération, les deux étant pourtant entre des mains étrangères à la Suisse. Swiss recevra un crédit de 1.5 milliard de francs alors qu’easyJet ne recevra que 20 millions.  Injuste, disent les uns qui mettent en balance, à juste titre, les quelques 10’000 employés d’easyJet Suisse avec les mille employés de Swiss. Aubaine, disent les autres, espérant qu’easyJet, spécialiste de l’augmentation débridée du trafic aérien à courte et moyenne distance, sera contraint à mettre un frein à ses projets expansionnistes. La décision du Département fédéral suisse des finances (DFF) ne peut donc s’expliquer que dans le souhait de maintenir en vie une compagnie porte-drapeau car, selon toute vraisemblance, aucune contrepartie contraignante n’a été exigée de Swiss (ni à easyJet d’ailleurs) pour la réduction de ses émissions de CO2.

L’actuel gouvernement français souhaite ainsi placer Air France comme un fer de lance de la défense du climat. Alors ? Réalité ? Marketing ? Greenwashing ?  L’avenir nous le dira mais en attendant, si cela pouvait faire bouger les gouvernements de la planète (hormis celui de Trump ou de Bolsonaro pour lesquels il n’y a guère d’espoir),  ça serait toujours ça de gagné. 

Je pars

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