“Shut up!”, ordonne à la passagère africaine l’employée andalouse de la compagnie aérienne


PAR PIERRE ROTTET

Scène surréaliste tôt en ce dimanche matin 3 octobre à l’aéroport andalou de Malaga, dans le sud de l’Espagne, lors de l’embarquement des passagers du vol EasyJet U2 1432 Malaga-Genève. Scène surréaliste… et surtout d’une affligeante attitude de discrimination raciale, dont infoméduse et nombre de voyageurs médusés ont été témoins.

Il est 6 heures et des poussières, en ce dimanche matin, pour les lève-tôt qui s’apprêtent à embarquer, avec en main passeport, billet de transport, certificat covid ou test PCR et bagages. Une file se forme. Et bientôt une seconde, à la demande d’une employée de la compagnie Low Cost. Laquelle vocifère plus qu’elle n’explique des instructions en anglais à des passagers d’expression espagnole ou française, en grande majorité. Des instructions que personnes ne comprend du reste, pas même ceux pour lesquels la langue de Shakespeare n’a pas de secret. Ou si peu!

Parmi les premières personnes à composer cette nouvelle file de passagers figure une jeune dame. Dont sa peau est aussi noire que la mienne est blanche. L’employée en question la prend en grippe, passant sur elle son courroux. Pourquoi? Les témoins de la scène ne comprennent pas les raisons de l’attitude ainsi affichée à l’endroit de la jeune dame. Si ce n’est que celle-ci est africaine.

Visiblement, Lute Zulu Mulenga, qui rentre en Suisse après quelques jours de vacances dans la région, ne s’attendait pas à ce déferlement de mépris au moment de présenter ses documents de voyages et certificats de santé à l’employée en question. Qui lui intime sans raison l’ordre de se mettre à la queue de la file!

Pardon? lance Lute, visiblement surprise et déroutée par la réaction de la furie qu’elle a en face d’elle… «Mais pourquoi donc», interroge-t-elle poliment. «Et pour qu’elle raison», insiste la jeune dame africaine, qui se voit asséner un retentissant «Shut up” (ferme ta gueule). “Mais “… proteste la victime de la violence verbale de la tyrannique employée de la compagnie aérienne. Lute n’a pas le temps d’en dire plus qu’un nouveau grossier et invraisemblable «Shut up” cingle.

L’insultant propos est maintenant assorti d’une menace: “J’ai le droit de décider si tu prends l’avion ou non. Et si c’est le cas, tu seras la dernière”…

Les «Shut up” et autres menaces n’ont pu échapper aux personnes encores présentes dans les deux files, visiblement choquées. Choquées et pourtant bien silencieuses dans leurs indignations, hormis Nins (*) qui s’attire aussitôt les foudres de l’outrancière. Elle ne mâche cependant pas ses mots pour dire à cette dernière que son attitude grossière et raciste envers la passagère africaine n’est pas acceptable. Elle aussi est aussitôt menacée à son tour de ne pas monter dans l’avion. Mais face à la détermination bien visible de Nins, la méprisable employée n’a d’autre ressource que de faire profil bas.

“Un acte raciste, à n’en pas douter, gratuit et qui n’avait d’autre but que d’emmm… la jeune dame africaine”, confiera à infoméduse Nins, scandalisée par cette discrimination raciale, indignée par ce déferlement de haine. Mais aussi de passivité de la plupart des passagers présents au moment de la scène. Nins a promis son témoignage en cas de plainte de la victime.

Ce que Lute fera, a-t-elle confirmé à infoméduse. Assistante de l’ambassadeur de la République de Zambie en Suisse, la jeune dame a finalement pu rejoindre – en dernier – les passagers déjà assis sans l’avion. Manifestement traumatisée, Lute n’a pas compris ce qui lui arrivait. Les raisons, elle les connaît. Par coeur! Même si jamais dans sa vie elle n’avait subi semblable humiliation.

Pour qui suit la politique, cette anecdote n’est pas si anodine et reflète peut-être un climat. Berceau de la formation radicale Vox, l’Andalousie est devenue un véritable laboratoire politique depuis que l’extrême droite s’y est imposée dans les urnes avec la bénédiction de l’influent Opus Dei et des principaux partis de droite, dont le Parti populaire et tout ce que l’Andalousie du poète Garcia Lorca compte comme nostalgiques du franquisme.

*Diminutif d’un prénom connu de la rédaction

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