Vaud Rail Gate

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

Dans ce qu’il convient d’appeler désormais le Vaud Rail Gate, l’idée d’une gare souterraine à Lausanne refait surface, si l’on peut dire. Soutenue par des citoyens éclairés, elle avait été balayée il y a une dizaine d’années. Au nom de quoi? On a parlé de budget, de l’ “obstacle” que constitue la ligne perpendiculaire du métro, mais la raison n’a jamais été très claire. Il est jusqu’au génial projet romand Swissmetro, tout aussi mystérieusement abandonné il y a 25 ans, pour connaître très logiquement un regain d’intérêt.

Impossible de savoir dans quelle direction s’achemine le chantier du siècle à Lausanne. Les autorités cantonales, Mme Gorrite en tête, réfléchissent tout haut, tracent des plans sur la comète. D’argent, il n’en est pas question, pour l’instant… Une chose est sûre, la tempête qui balaie le rail lémanique est un scandale majeur dont on subodorait la cause depuis plusieurs mois sans parvenir à obtenir une réponse de Berne. Un document publié par la RTS le révèle enfin. En substance: les travaux entrepris à la gare de Lausanne l’ont été au petit bonheur la chance. Au siège de l’Office fédéral des transports, on largue le mot fatal: danger létal pour les usagers. Ceci revient-il à dire que la sécurité n’était pas la priorité? A-t-on mis la charrue avant les boeufs, fermé les yeux sur les imperfections du projet?

A partir de là, se pose la question des responsabilités. Des décideurs répondront-ils de leurs actes devant la justice? Il convient aussi de se demander comment une région vantant le high-tech polytechnique parvient à sombrer de telle manière dans le chaos et le ridicule. Spéculation immobilière et conflits d’intérêts dans un donnant-donnant entre le canton, la ville et les CFF, propriétaires de la moitié des terrains aux alentours de la gare? Un musée édifié à grands frais sur une parcelle attenante aux quais, des immeubles rasés, des oppositions balayées, le tout dans l’indifférence politique générale.

Le vent mauvais n’épargne pas Genève, soit dit en passant. La ville du bout du lac a réussi à enterrer sa gare pour préserver le populaire quartier des Grottes mais elle passe complètement à côté des grandes options stratégiques des CFF. La ligne directe du pied du Jura est sacrifiée, Genève n’aura plus une liaison directe en direction de Zurich. Une aberration environnementale, voire historique tout court, le tracé « neuchâtelois », qui évite Lausanne, étant le plus direct.

Que fait, que vaut le lobby romand à Berne? Il s’agit d’un enjeu majeur, pourtant les médias lémaniques sont absents du débat. Une raison de plus pour regretter la perte de journaux de référence tant à Lausanne qu’à Genève à la fin des années 90. Ces traits d’union, dont les correspondants aguerris jouissaient d’un respect certain à Berne et Zurich, relayaient en terre latine la mentalité alémanique. Permettant à la Suisse romande d’exporter à son tour outre-Sarine une autre voix que des sempiternels larmoiements. Tempi passati.