Paradoxes du climat

PAR MARTIN DE WAZIERS

Du grec π α ρ α ́ δ ο ξ ο ς, contraire à l’attente ou à l’opinion commune, le thème du climat est sujet à tous les paradoxes… Le mot “humus” comme le mot “homme” proviennent tous deux de la même racine signifiant “terre” : même origine et cette envie où l’un détruit l’autre. L’écologie, ce savoir, qui devrait apprendre à l’homme la sagesse de l’humilité (autre vocable dérivant du mot “humus”) : courber l’échine, non sur le smartphone, mais sur la belle nature.

Autre paradoxe : les yakafokon de l’idéaliste humain contre ses propres actes du quotidien ; baisse-t-il son thermostat, oublie-t-il l’avion sur les petits courriers au profit du train et non de sa satanée voiture, trie-t-il ses déchets ? Que nenni ! Il y a éco-anxieux et éco-sceptiques, alors que les deux ont la même info discréditée par tous les mensonges débités par media et politiques ; encore un paradoxe : règne la peur pour dominer plutôt que l’amour pour libérer !

Cela se traduit aussi par le greenwashing et le RSE-marketing : de vulgaires galvaudages auxquels on peut rajouter les multiples jets privés qui vont prêcher la bonne parole à Davos ou aux COP… C’est en Orient que le concept de ‘bien commun’ a d’abord émergé et c’est plus récemment que la chrétienté l’a fait axe central de sa doctrine avec Laudato Si’ et, tout récemment, Laudate Deum. Viable, vivable, équitable, tel est le développement durable !

‘Déserter ou s’engager’, nous propose Hubert de Boisredon, dans son livre : quelques parias du système ont fait des gorges chaudes en voulant jeter le bébé avec l’eau du bain ! S’ils ont vilipendé tout le système capitaliste, ils se sont bien gavé sur la bête : à leur bénéfice, ils ont tapé le grand coup dans la fourmilière et forcé un nouveau paradoxe. Gaspard Koenig parle de bifurqueurs dans son merveilleux roman ‘Humus’ où deux jeunes s’engagent à fond !

Deux morales, intentionnelle ou conséquentielle : faut-il même s’engager pur et dur ou tout simplement suivre le mouvement car on n’en a pas le choix ? L’humanité a survécu, Darwin le dit : ce ne sont ni les plus forts ni les plus intelligents qui survivront mais les plus adaptables au changement ! Faut-il sortir de l’enfant gâté en surconsommation et après moi, le déluge ? Et se respecter soi, l’autre, alentour, avec ‘sobriété heureuse’, hommage à Pierre Rabhi ?

Du rapport Meadows de 1972 à celui du GIEC en 1990, et depuis, on nous met en garde et nous propose de réformer notre quotidien : on se croirait avec Tintin et l’Etoile Mystérieuse, le monde va nous tomber sur la tête ! Les glaciations se sont succédé au cours des millions d’années passées, la vie continue car l’homme sait s’adapter. Alors qui a raison, paradoxe ? Chacun peut faire sa part, philosophie du colibri oblige, mais personne n’y est obligé !

Faut-il être indigné à la Stéphane Hessel et faire de la résistance de baby-boomer face à la soi-disant jeunesse paradoxale ? Salomé Saqué conclut son excellent ‘Sois jeune et tais-toi’ en affirmant : ce qui compte, c’est la manière dont vous allez vous adresser à vos enfants et à vos petits-enfants à partir de maintenant ; c’est la façon dont vous saurez leur tendre la main et saisir la leur. Hubert de Boisredon prône le compagnonnage intergénérationnel !

Le monde est dualité, paradoxe des paradoxes. L’homme se croit invincible et fait son ‘reset’ comme le prônait le World Economic Forum en pleine pandémie : on repart comme en 40 ! Et les catastrophes naturelles, et leurs conséquences ? Le Pape François s’engage pour le bien commun mais les fidèles ne pratiquent plus, le matériel domine, le paraître est l’objectif quotidien. Fini l’être : où est donc la spiritualité, spir/souffle de vie, sens à donner à sa vie ?

Le bonheur est majoritairement issu de la relation humaine, a conclu Harvard après cent ans d’étude poussée (publié en français sous le titre ‘The good life’). Vivez l’amour, pas la peur ; faites l’amour, pas la guerre. Unissons-nous, engageons-nous dans un souci d’alignement tant personnel (corps, âme, esprit) que global (terre, humanité, univers). On peut cultiver sa différence mais mieux vaut réconcilier les paradoxes avec une vision engagée et sereine…

©Martin de Waziers

Parc de la Légende d’automne, Lausanne. Photo le Médusé, 7 novembre 2023

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Un commentaire à “Paradoxes du climat”

  1. Niclass Nicola 9 septembre 2024 at 12:45 #

    Bonjour Cher Martin de Waziers,

    Quand vous étudiez la philosophie, souvent, on vous demande : “A quoi ça sert ?”. Pourtant,

    cette science permet de développer son sens critique, de se questionner sur son égo et de

    réflèchir aux interactions que nous menons avec le monde.

    Je vous remercie pour vos encouragements et vos excellents articles.

    Cordiales salutations

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