La littérature est morte, tuée par le robot

infoméduse a demandé à ChatGPT de rédiger un polar. Le résultat est aussi bluffant qu’inquiétant. Le métier d’écrivain est en péril.

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

« Robot, peux-tu m’écrire un polar sur le thème sexe, sang, lac? ». A la question posée par l’auteur de ces lignes, ChatGPT suggère du tac au tac « un polar sombre et captivant ». Et déroule sur l’écran à la vitesse d’une lame marine un texte contenant cinq chapitres. Le titre du livre est donné: « Le Miroir du Lac ». Notez bien les majuscules, elles ajoutent de la crédibilité au projet.

L’histoire se déroule à « Chanterive, une petite ville, où tout le monde semblait connaître tout le monde ». Le récit débute par la découverte sur la rive du corps dénudé d’une jeune femme. Les chapitres s’intitulent « Les eaux troubles », « Les secrets immergés », « Les reflets brisés », « Le sang sous la surface », « Le miroir du passé ».

« Voici un polar sombre »

On obtient de la sorte un premier jet d’une vingtaine de pages. Dans un style alerte, accrocheur, le cadre est clairement posé. On se dit juste que pour réaliser un polar de 150 pages, cette ébauche n’est pas suffisante. Mais voilà que le robot vient à votre secours. Il est d’accord de ne pas s’arrêter en si bon chemin! Tout à la fin, on lit: « Voici un polar sombre qui joue sur les thèmes que vous avez proposés : sexe, sang et lac. Dites-moi si vous souhaitez approfondir certains aspects ou ajouter des détails! ».

Sans se faire prier, on peut ainsi interroger le robot à l’infini. Le but est de parsemer le récit de détails que ChatGPT imaginera sur la base de deux ou trois mots relançant l’intrigue. Il vous définira le personnage principal, le criminel, celui dont l’auteur dévoilera progressivement les bas instincts, les machiavéliques motivations. Les 150, voire 200, 300 pages du roman seront très vite remplies.

Le robot ajoutera à l’envi de la sensualité et de l’érotisme dans les débats, il situera l’action dans un cadre géographique précis, romantique à souhait. En témoigne cette description d’une localité située au bord d’une étendue d’eau pouvant fort bien se situer dans la région lémanique:

Le village de Saint-Rémy-sur-Lac possède des rues pavées qui serpentent entre de vieilles maisons aux façades de pierre, chacune ornée de volets en bois peints de couleurs vives, des teintes de bleu, de vert et de jaune. Les ruelles sont bordées de petits cafés et de boutiques artisanales, où l’on peut sentir l’odeur du pain frais et des croissants chauds. Les habitants, des visages marqués par le temps et la vie au bord du lac, se saluent d’un signe de tête ou d’un « Bonjour » amical, mais derrière ces sourires se cachent des histoires et des secrets qui s’entrelacent comme les racines des grands arbres du village.

Stop, Chat, c’est trop, n’en jette plus!

Plagiat impossible à repérer

Le propre du robot, c’est que sa capacité à inventer du texte à partir d’ingrédients donnés n’a pas de limites. Il n’a pas son pareil pour fabriquer du neuf avec du vieux. Dans ces conditions, démasquer une potentielle imposture relève des travaux d’Hercule. Inutile de vous échiner à dénicher le plagiat, il y a toutes les chances pour que vous n’obteniez jamais la preuve suffisante destinée à émouvoir un juge. ChatGPT tricote des intrigues comme un lutin hyperactif et fuit comme une anguille.

Avec quelles conséquences pour la littérature? Mondialisé il y a tout juste deux ans, le robot fait la une des journaux qui fêtent cet anniversaire comme s’il s’agissait du petit Jésus. Samedi 30 novembre, le journal « Le Temps » lui consacrait 8 pages. Le même jour, la RTS bloquait trois heures matinales. Et sur les réseaux circulent des vidéos où de jeunes entrepreneurs de polytechnique chaussant basket blanches se trémoussent de bonheur sur l’air de l’avenir radieux de l’IA, l’acronyme du robot. Le thème des risques est bien évoqué dans les chapeaux mais on a beau chercher, nul danger n’est clairement signalé. L’impression générale que donnent les médias est que l’IA sauvera le monde. Pourquoi cette mansuétude alors que la réalité est hélas différente? Evidemment, les enjeux financiers sont colossaux. L’utilité scientifique est patente. L’idée n’est pas ici de nier les services que ChatGPT rend à la chirurgie et à la radiologie, par exemple. Mais il est des domaines où le robot n’a pas sa place. La création intellectuelle est de ceux-là.

Le métier d’écrivain, tout particulièrement, est concerné. Le pire (ou le mieux) c’est que ChatGPT a beaucoup de talent. Un lecteur moyen a toutes les chances de se contenter, voire même de se délecter d’un roman portant telle ou telle signature mais qui serait écrit par un robot. Finalement ce n’est pas son problème. C’est comme demander à un amateur de McDo pourquoi il préfère la viande hachée entre frites et ketchup à une entrecôte Café de Paris. Le goût relève du subjectif, tant pis si le diététicien fait grise mine. La différence entre le McDo et la littérature, c’est que le premier ne triche pas. Il n’existe aucune ambiguïté entre Ray Kroc, feu le fondateur de l’université du hamburger, et le produit tel qu’il est vendu sous l’enseigne jaune. Mais que dire, en revanche, d’un pseudo-écrivain qui signerait un livre écrit par un robot?

Inflation de romans

L’utilisateur de Facebook ne peut que s’étonner d’un phénomène qui semble coïncider avec l’apparition de l’intelligence dite artificielle, à savoir le nombre de romans publiés par des personnes qui n’ont jamais écrit de livre et se voient relayées dans les pages culturelles de journaux. Cela va de l’écolière de 18 ans au retraité de 75 berges. Bien sûr, tout le monde a le droit de savourer le plaisir d’une séance de dédicaces à la librairie Tartempion. Mais on aimerait être sûr que la présence desdites personnes à ces événements récompense des créations authentiques. Et qu’elle ne soit pas le résultat d’une imposture. L’enjeu étant rien moins que la sauvegarde du métier d’écrivain. Et, par voie de conséquence, celle du traducteur, de l’imprimeur et du libraire. En France, nous annonce-t-on, de nombreuses librairies, menacées parallèlement par Amazon, mettent la clé sous le paillasson.

La littérature est-elle en train de mourir, tuée par un robot? Si les associations d’écrivains commencent à prendre conscience du problème de l’IA (article ci-dessous), le phénomène est encore trop récent pour que les auteurs s’en émeuvent vraiment. Et qu’en disent les autres acteurs du monde de l’écriture? Saurait-on en vouloir à un brave éditeur qui tient en main un manuscrit écrit avec la complicité d’un robot de tomber dans le piège de la tromperie? Quand le livre n’est pas publié à compte d’auteur, l’aventure équivaut à un voyage dans un monde étrange peuplé d’éditeurs, de libraires et de diffuseurs. Dans ce sinueux manège, l’auteur est le seul à savoir s’il a vraiment le mérite de la création du livre. L’éditeur peut être complètement dupe. A moins qu’il ne soit conscient du potentiel de l’IA, au point de participer entièrement à la foire d’embrouille. Des éditeurs de journaux, eux, l’avouent déjà sans ambages, l’IA sera parachutée dans les rédactions pour réduire les coûts en économisant sur les salaires des journalistes.

Le monde anglo-saxon est mieux adapté à l’évolution technologique. Rétif à la robotisation, l’esprit français risque l’anéantissement, prophétisait en substance Bernanos en 1947. L’avenir est-il en train de lui donner raison?

« L’intelligence artificielle n’est pas une intelligence »

Au début de l’année 2024, l’Association Autrices et Auteurs de Suisse (AdS) – cette organisation littéraire, la plus importante de Suisse, est née de la fusion du Groupe d’Olten et de la Société suisse des écrivains – et ses homologues autrichienne et allemande ont publié un « Manifeste en faveur d’une langue humaine » dénonçant « les machines qui trompent les lectrices et lecteurs sur la paternité et la prétendue vérité de leurs textes ». Leur constat est sans appel:

L’intelligence artificielle n’est pas une intelligence ; pour cela, il lui faudrait l’intelligence émotionnelle,morale, sociale, esthétique, la raison pratique et l’expérience qui se nourrit de la corporalité et du mouvement. De ce point de vue, on ne peut taxer l’évolution technique des robots linguistiques de «progrès».

La suite est à bien plaire de la part des gouvernements respectifs. A Berne, l’Office fédéral de la communication est chargé de faire un état des lieux concernant une éventuelle réglementation de l’intelligence artificielle. En attendant, une interpellation du Conseiller aux Etats thurgovien Jakob Stark n’a eu droit qu’à une réponse très vague de la part du Conseil fédéral. La Suisse semble suspendue aux avis de Bruxelles et surtout de Washington.

L’optimisme n’est pas de mise quand on sait qu’aux Etats-Unis, l’état-major du président élu Trump comptera en son sein de farouches partisans de l’IA. Le milliardaire Elon Musk se plaît à l’annoncer: l’intelligence artificielle sera plus intelligente que l’ensemble des humains d’ici 2029.

« Je vais continuer le roman » ou comment ChatGPT brode sur du « croustillant »

Poursuivant son enquête, infoméduse a demandé à ChatGPT d’introduire des « détails croustillants » dans la relation qu’entretiennent deux protagonistes proposés par le robot. Réponse de l’intéressé: « Je vais continuer l’histoire en intégrant des éléments de tension et de profondeur, tout en maintenant le ton noir et mystérieux du polar ». Extrait.

Ce soir-là, alors qu’elle retrouvait Clément près du lac, la tension était palpable entre eux. Il n’y avait pas de place pour les mots superflus, et pourtant, Camille ne pouvait s’empêcher de se rappeler leur première rencontre, où le silence avait été leur seul langage. Clément n’était pas Pierre, il n’avait pas cette arrogance séduisante, mais il avait un regard sombre et une intensité que Camille comprenait. Il s’avança vers elle, son visage marbré de fatigue et de peur.

— Je sais ce que tu ressens, dit-il, le souffle court, comme s’il avait lutté contre l’envie de la toucher, de la retenir. La passion, l’adrénaline… ça nous a consumés tous les deux, Camille. Mais Pierre n’était pas le seul à avoir des secrets. Toi, moi, nous… on a tous joué un rôle, et le prix était bien plus élevé que ce qu’on imaginait.

Elle sentit le danger de l’instant. Les souvenirs de leur dernière nuit à trois, où Pierre et Clément avaient partagé des confidences, ressurgirent. Leurs corps avaient été les témoins silencieux de la lutte entre la loyauté et la trahison. Pierre, la voix rauque, leur avait promis qu’aucun de leurs ennemis ne saurait jamais la vérité, même si cela signifiait se sacrifier. Clément avait pris la main de Camille, l’embrassant avec une ferveur désespérée, la même que celle qui animait Pierre. Ils avaient partagé un instant d’oubli, une explosion de désir pour couvrir l’angoisse qui grandissait.

— Si tu ne veux pas que tout s’effondre, il faut que tu comprennes, murmura Clément, les doigts effleurant sa joue, ses yeux plongés dans les siens. Le passé est revenu, et il est prêt à réclamer sa part.

Leurs lèvres se frôlèrent, le goût salé des larmes se mêlant au désir. Elle savait que rien ne serait plus jamais pareil. La forêt semblait se resserrer autour d’eux, le lac murmurant des menaces à peine audibles, des promesses de conséquences imprévisibles.

Camille sentit son cœur s’emballer. La chaleur de la peau de Clément contre la sienne, le poids des secrets partagés, les caresses à la lisière du danger, tout cela l’entraînait dans un tourbillon où le désir et la peur se confondaient. C’était un risque qu’elle ne pouvait plus ignorer, mais le prix à payer était incertain.

La nuit devint un terrain de jeu où la vérité et la trahison se mêlaient, où les amants d’hier se transformaient en ennemis de demain. Camille savait que le lac garderait toujours les traces de leurs actes, ces souvenirs brûlants et ces échos de passion, jusqu’au jour où le sang serait à nouveau versé.

« Le lac murmurait des menaces à peine audibles, des promesses de conséquences imprévisibles. »
Photo ©01.12.2024 infoméduse

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15 commmentaires à “La littérature est morte, tuée par le robot”

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    Christian Lecerf 2 décembre 2024 at 07:30 #

    Le style est assez pauvre, aseptisé et à vrai dire passe-partout. Ces extraits font penser à des romans pour midinettes, de ces livres qu’on achète dans les gares et qu’on jette à la poubelle avec son ticket sur le quai d’arrivée.
    Un vrai style littéraire se reconnait par son caractère, sa puissance et son originalité. Rien à voir avec cette bouillie pour les chats totalement insipide.
    Enfin comme disait Desproges, l’humour étant ce qui distingue l’homme de la bête, on peut se demander si l’IA est dotée de cette forme d’esprit. J’ai de sérieux doutes sur la question…

    • Denyse Hay 4 décembre 2024 at 10:21 #

      Excellent!

  2. Eran Shamgar 2 décembre 2024 at 09:59 #

    Excellent article !

    La majorité des gens s’accommodent de la médiocrité, il suffit de regarder les affiches qui encombrent nos murs…

  3. José ROOSEVELT 2 décembre 2024 at 12:40 #

    Mais c’est d’une pauvreté épouvantable, ce texte généré par ChatGPT ! Que des clichés archi-utilisés et ringards! Vous auriez dû nommer votre article: « La sous-littérature est morte… ». Mais même pas, la sous-littérature ne meurt pas, elle continuera à plaire au plus grand nombre, comme elle l’a toujours fait, qu’elle soit générée par des robots ou des êtres humains (il n’y a qu’à voir ce qui se vend le plus aujourd’hui).
    La valeur littéraire d’une oeuvre ne s’estime pas au nombre d’exemplaires vendus. Ça a toujours été comme ça. Rien n’a changé.
    Amitiés

  4. Ferenc Rakoczy 2 décembre 2024 at 12:50 #

    Je trouve la photo mieux que les textes de Chat GTP, est-ce à dire qu’elle est de toi? A part ça, les textes sont assez médiocres en effet, ce qui frappe c’est le côté convenu des adjectifs, des locutions et des situations, mais c’est évidemment quand même pas mal pour une jeune IA. Ceci dit, si un jeune poète venait avec ça me voir, je lui conseillerais quand même de ne pas trop s’échiner: la marge de progression risque d’être mince.

  5. Yves Ecoffey 2 décembre 2024 at 14:35 #

    « croustillant », certes, mais pas « gouleyant »: car à la foire aux vins de Martigny, c’est un… ROBOT qui le sert, le dit vin… pauvre somme y ai! car demain dit ROBOT boira le Divin nectar (sang du christ?) du blanc? de la sève, car n’ive Or…
    On y va bon train (mais sans: passe âgé!)
    Certes, GTP: J’ai très passé!
    Si Jésus crie la caravane passe, mais allons de l’Avent!
    Médusé, je ne le suis pas encore, mais espère encore pouvoir… d’use ai et espère pouvoir encore si de la Muse ai.
    Y.

  6. Ian Hamel 2 décembre 2024 at 18:38 #

    Je vous félicite pour cet article et cette expérience que je n’ai pas réalisée moi-même. Je ne dirais pas que le texte “imaginé“ par l’intelligence artificielle est médiocre, horrible. Il est seulement pas terrible. Mais la presse n’est pas terrible non plus. Les journalistes n’ont plus le temps, ni les moyens. Ils utilisent le téléphone car le journal ne paye plus un Genève-Lausanne. Résultat, les éditeurs, pour cesser de perdre de l’argent, ne vont plus se gêner très longtemps avant d’utiliser l’intelligence artificielle.

    Je vous donne un exemple: j’habite en France voisine dans une ville de 17 000 habitants. A mon arrivée, il y avait « Le Progrès », « Le Dauphiné », et un hebdomadaire local « La Tribune républicaine » (qui appartenait au « Messager » ). « Le Progrès » a disparu avant le covid. « Le Dauphiné », pendant le covid. Et « La Tribune républicaine » début novembre 2024. Il n’y a donc plus un seul journaliste local dans cette ville. Les habitants ignoreront les décisions du conseil municipal. L’un des responsables du « Messager » m’a confié que chaque année ils perdaient 8 % de lecteurs. On peut penser que d’ici 2-3 ans ils seront contraints de remplacer une partie de la rédaction par l’IA. D’autant que les journaux locaux sont faciles à rédiger: ils ne disent systématiquement que du bien.

  7. Le Houelleur Yann 3 décembre 2024 at 01:09 #

    La prétendue démocratisation de la culture, que ChatGPT est censé favoriser, n’est en fait que la recherche et la mise au point, par un écheveau de lobbyings et d’intérêts obscurs, de l’abaissement du niveau général. On peut aussi parler d’une bascule vers un monde s’en retournant à l’âge de l’esclavage dont notre civilisation occidentale avait cru se délester à tout jamais. Il s’agit ni plus ni moins d’avorter la capacité de pans entiers de la société à progresser par la force du travail, par le courage sinon l’abnégation, quant à celle-ci bien différente de la notion d’esclavage. (L’abnégation est consentie ; l’esclavage est imposé.)
    En échange du silence qu’on leur impose, les nouveaux esclaves sont forcés (ils n’ont même pas le choix) d’accepter des aides qui les maintiennent davantage encore dans l’apathie, la paresse, le désœuvrement. Peu importe aux affamés de pouvoir et d’argent si le peintre, l’écrivain, le musicien – en résumé, l’artiste – dort dans sa voiture car incapable d’acquitter un loyer grâce au fruit de son travail. Si l’artiste se plaint, la tyrannie et même la dictature mises en «œuvre» sournoisement par «le système» nous fera entendre et peut-être dans le pire des cas comprendre : « Tu ne dois plus te considérer comme un artiste dans ton petit monde à toi mais si tu veux vivre dignement ( !!!) tu dois aller casser des pierres sur un chantier ou te mettre en quête d’un boulot dans les rares usines qui subsistent. »
    Précisément, devons-nous craindre, l’IA vient en aide non pas seulement aux chirurgiens, aux planificateurs, aux architectes, aux bureaucrates et même aux enseignants; elle favorise l’instauration d’une société où il n’y a plus de frontières du tout : plus aucun contraste entre le bien et le mal, plus aucune différence entre le salariat et les petits boulots payés au lance-pierre, et c’est bien ce qui personnellement m’inquiète le plus : aucune possibilité ne nous sera offerte, demain ou après demain, de recourir à la nuance. Dès lors, le système (il faudrait bien définir ce qu’on entend par ce mot) va jusqu’à éliminer en silence tout ce qui peut contredire sa volonté d’être l’unique partenaire, l’unique autorité à laquelle on s’adresse : il nous faut maintenant passer par le tout numérique pour obtenir – précisément – des conseils et de l’aide, il nous faut absolument être connectés en permanence au « monde global », il nous faut oublier l’existence de tout objet tangible et concret et se rendre devant un fait accompli : la réalité telle qu’elle se présente à nous est incontestable. Nul ne sera, dans un futur proche, habilité à l’ignorer ou à douter de son soi-disant bien fondé.

  8. Martin de Waziers 3 décembre 2024 at 07:57 #

    Merci, Xian, pour ton écrit qui va dans le sens de mon article : https://www.infomeduse.ch/2024/11/09/ai-ou-le-nivellement-par-le-bas/ !
    Merci, Xian, car on sent vraiment l’écrivain et le journaliste qui y met son coeur, ses tripes, sa vraie intelligence globale, pas stockage… Car, si, si, l’AI est intelligence mais ‘médiocre’ comme le disent les commentaires ci-dessus: elle réduit l’homme à un stockage de données. Howard Gardner, théoricien des multi-intelligences, nous dit combien il est réducteur de se reposer sur le seul QI, un stockage, je répète ce mot, basique, à la base !
    Et oui, nous, narrateurs, avons l’intelligence globale de nous hisser et d’entaîner le ‘lecteur moyen’ que tu cites, vers de hautes sphères.

  9. Artemis 3 décembre 2024 at 12:18 #

    Edifiantes expériences, la vôtre et celle du Médusé, le style « kitch, c’est ce que chatgpt véhicule?!! Mais par bonheur il y a encore la sensibilité du poète, son âme vagabonde, son regard contemplant, son humour sage, tout un monde accessible à ceux qui le cherchent.

  10. Denyse Hay 4 décembre 2024 at 10:23 #

    Que c’est beau tous ces commentaires! Merci pour nous les faire partager et merci pour nous avoir permis de lire ce texte. C’est tout de même rassurant! Et l’Homme n’est pas encore remplacé!

  11. Jean-Claude Piguet 4 décembre 2024 at 17:03 #

    C’est édifiant, et bien peu réjouissant pour l’activité d’éditeur, bonne chance pour reconnaître l’ivraie du bon grain et ne pas se faire totalement ridiculiser. On attend les réactions des politiques, mais sans grande illusion. En effet l’IA c’est comme la roue, une fois qu’on l’a inventée, difficile de la désinventer…
    Jean-Claude Piguet, éditeur, Sainte-Croix

  12. Nicola Niclass 5 décembre 2024 at 17:55 #

    Bonjour,

    Nous pouvons toujours tricher envers les autres mais il nous est impossible de feinter envers nous-mêmes. Il est très rare qu’un écrivain reconnu

    ait manqué de respect envers ses lecteurs.

    Nicola Niclass
    http://www.amazon.fr

  13. Marc Desplos 6 décembre 2024 at 14:57 #

    Votre article est très réussi et je partage avec vous l’inquiétude que vous manifestez quant aux possibilités, à la fois effrayantes et fascinantes, générées par l’IA. Je répondrai, pour ma part, de la manière suivante.

    L’IA sait produire du texte, et le fait plutôt bien, et très rapidement. Toutefois, elle le fait de manière assez standardisée, et pour être honnête, ce qui est produit par elle, dans votre article, ne m’intéresse pas en termes littéraires. Je n’y vois que des clichés littéraires, des métaphores et des propos convenus. En revanche, si cette même production m’était présentée comme celle d’un élève, et non celle d’un écrivain, je la jugerai plutôt excellente, en effet (et c’est là un autre débat). Menace-t-elle les écrivains ? Partant du principe que tout écriture réelle est une résistance et du fond et de la forme, je dirai que non. Pas pour l’instant. Elle menace plutôt, tout comme la mauvaise littérature, d’envahir de manière standardisée le marché littéraire et nos univers de pensée.

    Cela implique à mon avis deux choses. L’écrivain doit, plus que jamais, résister par l’inventitivité formelle et par la singularité d’une voix et d’un style. Il faudra également, je pense, s’intéresser de plus près au lieu où s’origine la parole de l’écrivain, et donc ne pas seulement « lire » sa production écrite, mais entendre ce qu’il a à nous en dire. Car l’IA peut produire du texte certes, mais elle n’a rien à nous dire. En cela, elle possède une intelligence computationnelle, mais non sémantique.

    Marc Desplos, poète, enseignant de littérature au Gymnase Auguste Piccard, Lausanne

  14. ProLitteris 6 décembre 2024 at 15:00 #

    Nous vous remercions de votre message et vous faisons suivre la position actuelle de ProLitteris au sujet de l’Intelligence Artificielle.

    Comme les autres sociétés de gestion, ProLitteris suit de très près les développements technologiques et les discussions sur leur encadrement juridique.

    En ce qui concerne l’entraînement à l’intelligence artificielle, ProLitteris, comme d’autres institutions du domaine culturel, a déclaré un opting-out. Selon cette déclaration, dans les domaines de l’art et de l’audio, les œuvres des ayants droit de ProLitteris ne peuvent pas être utilisées sans licence à des fins d’entraînement. Cette déclaration trouve son fondement dans les dispositions de l’UE en matière de text and data mining, mais doit s’appliquer aux processus de formation dans le monde entier. Cette déclaration agit comme un panneau d’arrêt. Le respect au niveau international doit être observé et n’est pas facile à contrôler. Pour les autres domaines tels que le texte fixe ou les images et photographies en dehors des œuvres d’art, ProLitteris n’a actuellement pas le mandat pour une telle déclaration. Si une telle déclaration fait ses preuves dans la pratique, un tel mandat pourra également être obtenu pour les textes fixes (fiction et non-fiction).

    Dans le domaine de l’output de l’IA générative, ProLitteris précise, par une nouvelle clause dans les conditions de gestion, que seules les œuvres protégées par le droit d’auteur peuvent être déclarées et participer aux répartitions. Les contenus purement créés par l’intelligence artificielle ne peuvent donc pas être déclarés. Dans la mesure où l’intelligence artificielle est utilisée comme outil ou que l’output est encore essentiellement édité et adapté par un être humain, il s’agit d’un droit d’auteur.

    Nous restons à votre disposition pour toute question.

    Meilleures salutations,

    Sophie Althoff
    Team Info, ProLitteris, Zurich

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