CFF, Guernica sous Lausanne


Le loup blanc de la gare de Lausanne se faufila entre les immeubles sacrifiés. Le propriétaire, CFF Immobilier, avait signifié leur congé aux locataires, le complexe centenaire à loyers modérés sera détruit. Le bâtiment vide résonnait des voix d’anciens jeunes habitants venus sprayer une fresque d’adieu. Quand la paix provoque Guernica, la guerre n’a pas le monopole de l’anéantissement. La spéculation immobilière se charge de la sale besogne. Une place verra le jour à l’endroit des immeubles abattus, le café sera augmenté de 30% dans les établissements publics du coin.

Le loup blanc de la gare se dirigea vers l’ex-hôtel GuestHouse. Lors de la venue de Greta, plusieurs dizaines de jeunes activistes du climat y avaient trouvé refuge. Central, accueillant et bon marché, le GuestHouse répondait à un véritable besoin. Mais les CFF ont invoqué l’élargissement des voies pour le condamner à être rasé. En attendant le bulldozer fatal, il nargue encore les promoteurs. Le loup blanc constata que le GuestHouse se trouve malencontreusement exactement en face de la verrière du blockhaus du nouveau musée d’art, quasiment l’unique accès vitré à une vue sur l’extérieur. Le GuestHouse cache le lac… 

Le loup blanc de la gare monta dans un bus, hors de lui. Sur les terrains des CFF, entre Lausanne et Morges, entre Lausanne et Yverdon, le trajet en train longe de vastes chantiers, des kilomètres d’immeubles en béton pour logements concentrationnaires. Retards et erreurs d’annonces ponctuent ce maelström de constructions. Le bus n’était pas à l’heure, le loup blanc passa sa mauvaise humeur sur la conductrice, qui ne lui en voulut pas. Les autres passagers observaient la scène sans dire un mot. Ainsi s’implantent les dictatures, par absence de réaction.

Le loup blanc de la gare se réfugia sur les hauteurs, là où l’homme résiste à l’appel de l’argent vite gagné. Il tomba sur un article de journal où l’on parlait du départ du PDG des CFF, en 2020. La présidente de la régie essuyait aussi des critiques. Des élus demandaient à ces pontifes surpayés de ne pas sacrifier le trafic ferroviaire à d’autres intérêts. La mission première des CFF est le transport des voyageurs, non le courtage. Les politiciens s’en souviendront-ils lors de la prochaine législature? 

Christian Campiche

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