Dans un ouvrage éponyme paru juste avant la COVID, Amin Maalouf concluait son étude en disant : «Il serait triste que le paquebot des hommes continue à voguer ainsi vers sa perte, inconscient du danger, persuadé d’être indestructible, comme l’était jadis le Titanic avant d’aller s’abîmer dans la nuit contre sa fatidique montagne de glace, tandis que l’orchestre jouait ‘Plus près de Toi, Seigneur’ et que le champagne coulait à flots.» Adieu la liberté !
S’il parle de la bascule des années 70 qui a précipité 2 révolutions en 1979, une islamique qui trouve sa source en Iran et une conservatrice qui naît au UK… 50 ans plus tard, notre liberté a clairement souffert et notre civilisation étouffe sous la contrainte, celle des clivages confessionnels qui ont dérapé dans le terrorisme, citons le Bataclan, et celle des nombreux conflits (56 terrains aujourd’hui) qui ont créé la crise des réfugiés, 2 événements de 2015.
L’étouffement est devenu universel
Une décennie à nouveau, celle de l’ONU pour la restauration des écosystèmes qui trouve sa source avec la publication de Laudato Si’ par le pape François pour la sauvegarde de Gaïa, la maison commune, appelant à l’écologie intégrale, héritée de St François d’Assise, patron des écologistes. C’est aussi une décennie de dérive de la dette publique, e.g. la France qui passe de 97% du PIB fin 2015 à 114 % aujourd’hui : l’étouffement est devenu universel !
Tout va très bien, Madame la Marquise, dit la chanson ! On déplore de ‘tous petits riens’ qui, cumulés, nous entraînent à la catastrophe. Faut-il une bonne guerre pour en finir avec cette indolence et ce laisser-aller, ce ‘whatever it takes’ de Mario Draghi pour sauver l’€ en 2012 et repris en chœur pour sauver le monde en 2020 ? Ou faut-il faire preuve d’espérance et oser appeler à un retour de valeurs universelles : paix, respect, écologie, sobriété et dialogue ?
L’esprit du temps
En tous cas, à l’instar des réformateurs de 1ère décennie citée plus haut (Jean-Paul II, Deng Xiaoping, Khomeini, Thatcher), sont apparus ceux de 2ème décennie (Trump, Léon XIV, U2, Madonna) appelant tous à la paix. L’esprit du temps (issu de l’allemand Zeitgeist) représente l’atmosphère intellectuelle, sociale et spirituelle dominante d’une époque : est-ce la paix ? Si j’émettais l’idée de paix intérieure au premier abord, on en est, peut-être, loin dans le monde.
A l’ère des influenceurs et à la vitesse de propagation d’un nouveau courant dominant, peut-on croire à une flambée de poudre contagieuse pour la paix ou, même, une trêve prolongée, à la manière d’un Joyeux Noël ? L’esprit du temps peut créer des conditions providentielles qui, à l’heure du mimétisme implacable via Instagram ou l’IA, nous ramènent au bon vieux temps. Cela me rappelle la belle chanson de Serge Reggiani : il suffirait de presque rien !
La théorie des cycles de Kondratieff indique des renversements périodiques de 40 à 60 ans. La période 1919-1929, connue comme les Années Folles, est une décennie d’après-guerre caractérisée par un essor économique, une effervescence culturelle et des bouleversements sociaux, mais elle se termine brusquement avec le krach boursier de 1929, qui marque le début de la Grande Dépression et un changement d’atmosphère vers des tensions accrues.
Extrémistes en quête d’ego
50 ans plus tard, 1969-1979 est marquée par la fin des Trente Glorieuses et l’entrée dans une ère de crises, notamment les chocs pétroliers de 1973 et 1979, la fin de la convertibilité or/dollar en 1971 et la généralisation de la globalisation financière. Cela suivait les chocs sociaux de 1968 et le pic de la culture alternative, avec Woodstock, tandis que la fin de la période est marquée par des développements importants comme la Détente Est-Ouest.
Et maintenant, peut-on retrouver cette énergie révolutionnaire au sens astral ou Darwinien, laisser de côté les thèses comme le Great Reset de Davos, rêver d’un équilibre entre Etat moins intrusif à la 1984 de George Orwell et entreprise plus vertueuse qu’Ayn Rand ne le prônait dans Atlas Shrugged. Trouvera-t-on le juste milieu dans les débats pathétiques des extrémistes en quête d’ego ? Vers quelle civilisation se dirige-t-on ? Espérer spirituel… ?
©Martin de Waziers, Bruxelles


