La guerre est là, confiance!

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

Le bombardement du Yemen constitue-t-il le prélude à la Troisième Guerre mondiale? Politologue à l’université de Kyoto, Pascal Lottaz craint que les Etats-Unis n’aient choisi l’option militaire forte dans l’intention d’en découdre une fois pour toutes avec l’Iran, soutien de la Palestine.

Plusieurs éléments militent en faveur de cette hypothèse, souligne le chercheur dans une vidéo diffusée sur sa chaîne youtube. D’abord l’hospitalisation subite du chef du Pentagone, Lloyd Austin. La mise hors d’état de nuire de cette «colombe» laisserait la voie libre aux faucons qui cherchent l’affrontement avec les ayatollahs de Téhéran.

Selon cette anticipation, les attaques de missiles sur le Yemen ne manqueraient pas d’entraîner des représailles et d’alimenter le prétexte à la guerre: la destruction d’un navire américain par les «rebelles» houthis, en réalité la tribu qui gouverne le pays allié de l’Iran. S’ensuivraient des centaines de morts parmi les Marines, la réaction rapide de la Maison Blanche qui décrétera la guerre sans même obtenir l’approbation du congrès.

On croit assister à la répétition du scénario de la guerre d’Irak. Où l’on retrouve une vieille connaissance qui n’est autre que le Forum économique mondial. Hasard du calendrier, le WEF est l’artisan ces trois prochains jours de rencontres entre les dirigeants des pays occidentaux.

La guerre d’Irak, 2003. Cette année-là, le WEF se déroule dans le contexte de l’après-11 septembre, la destruction des tours mythiques de New York, une volonté affichée de vengeance aux Etats-Unis. Lula, président de gauche fraîchement élu au Brésil, est la vedette à Davos, il est même question que la Corée du Nord envoie une délégation. La mode est au forum alternatif de Porto Alegre, les contestataires défilent dans les rues de la station grisonne ressemblant déjà à un chateau assiégé. Mais on est encore loin, très loin, des mesures de sécurité exceptionnelles mises en place aujourd’hui aux frais du contribuable. Au WEF, c’est la tradition, on privatise les bénéfices et on laisse les dépenses à l’Etat.

En 2003 toujours, c’est surtout un personnage au physique de boxeur et décoré comme un arbre de Noël qui finit par capter l’attention des médias. Colin Powell ne cache pas l’intention américaine d’intervenir en Irak. Déterminé à se débarrasser de Saddam Hussein, bouc émissaire de la tragédie de Manhattan, 15 mois plus tôt, le chef de la diplomatie américaine cherche un maximum de consensus parmi ses alliés.

Aujourd’hui le grand satan n’est plus à Bagdad mais à Téhéran. L’histoire se répétera-t-elle? On peut toujours espérer que l’Iran ne tombera pas dans le piège de la provocation. Avec toutes les conséquences qu’entraînerait l’escalade. L’inconnue étant à Moscou. Comment réagiraient les Russes?

Neutres au moins sur le papier, les ministres helvétiques tenteront-ils d’exercer une influence apaisante? Tel serait leur devoir, même si la réalité du terrain impose un certain scepticisme. En auraient-ils la volonté réelle que l’on s’ingénierait à déjouer leurs plans pacifiques. Tant il est vrai que le démiurge du WEF, le professeur Schwab, manie avec grande habileté l’art du marketing. A Davos, on vient sans cravate, on cause au coin du feu. C’est l’économie qui est au menu, nullement les grandes stratégies militaires. En témoignent les grands thèmes du forum, parfaitement insipides: «Leadership par temps troublé» (2002), «Partenariat pour la sécurité et la prospérité» (2004), «Prendre la responsabilité de décisions dures» (2005)… L’avant-dernier WEF de 2023 ne fait pas exception, qui évolue en musique douce avec l’air de la «Coopération dans un monde fragmenté».

«Rétablir la confiance». Ironie du sort, le slogan de 2024 est absolument identique à celui de… 2003. Tenons-nous les pouces!